TOUR DU MONDE I 1996-1997 Europe-Afrique



Afficher Tour du Monde 1996/1997 sur une carte plus grande

Attention, il y a deux pages sur cette "Google-Map", il faut descendre jusqu'au bas de la liste de gauche pour passer à la deuxième (depuis l' Indonésie jusqu'au retour en France)




L'idée de faire un tour du monde me trottait dans la tête depuis que j'avais jeté un regard sur mon premier atlas. Tout m'y incitait : l'aventure, ma passion pour l'histoire du monde, le goût des grands espaces et l'amour des animaux sauvages mais aussi des beautés architecturales, les rencontres éventuelles, une forme de quête spirituelle, le besoin de se remettre en question et de prendre de la distance, la nostalgie de mes deux précédents voyages sur la route des Indes. Bref, quand l'occasion s' est présentée je n'ai pas hésité un instant. A cette époque internet balbutiait dans ses langes et j' ignorais l' existence d' ABM mais je n'en avais pas vraiment besoin car je partais sur le mode qui m' est familier, celui de la rupture. Je vendais mon appartement pour financer mon voyage et je ne me fixais aucun délai pour revenir avec l'idée de profiter de toute possibilité qui s'offrirait de rester quelque part sur place mais sans illusion, vu mon âge (déja la cinquantaine) Pour l'itinéraire j'ai choisi un thème purement géographique : ayant remarqué que les continents étaient traditionellement au nombre de cinq de même que les cercles qui découpent la planète, je décidais de franchir chacun de ceux-ci dans un continent approprié : pour l' Europe ce ne peut être que le cercle polaire arctique, ce qui ne laisse à l' Asie que le tropique du Cancer, que j'avais déja traversé lors de mon deuxième voyage en Inde, en 1975. En ce qui concerne l'équateur j' avais le choix entre l' Afrique et l' Amérique : le continent noir plus proche de la France me proposait à son tour deux options : le Gabon ou l' Afrique de l' Est. Cette dernière avait l'avantage sur le Gabon de cumuler d'énormes attraits : le Kilimandjaro, sommet accessible même aux personnes non expérimentées dans l' alpinisme, la région des grands lacs, les lieux de découverte des ossements des tout premiers hommes, les parcs naturels préservant les gorilles de montagne, l'île légendaire de Zanzibar et les sources mythiques du Nil....bref, ya pas photo....au singulier, car en ce qui concerne le pluriel...
L' Amérique du sud serait donc le continent où je franchirais le tropique du Capricorne. Quant au cercle polaire antarctique, il attendra que j'aie les moyens de m'offrir une croisière ruineuse à partir de l' Océanie !

Avant-Première

En 1992 l'entreprise pour laquelle je travaille (Dassault Aviation) propose de financer des départs volontaires et je saute sur l' occasion pour relancer le grand projet de ma vie. Mais je ne peux ouvertement invoquer ce motif et dois patienter encore quatre ans en prenant un nouvel emploi provisoire car on ne m'aurait pas laissé partir ainsi sans filet, du moins cette année-là, car dès l'année suivante on a procédé à des licenciements secs.
En attendant je me rends à l' exposition universelle de Séville (voir la page "Expositions Universelles") en octobre, qui a été organisée en commémoration du cinquième centenaire de la découverte (officiellement !) de l' Amérique par Christophe Colomb.

Préliminaires

Pour financer ce tour du monde je mets mon appartement en vente. Un acquéreur éventuel se montre suffisament intéressé pour commencer les démarches lorsque le 15 juillet 1996 à 2 heures 13 du matin survient un tremblement de terre de magnitude 5,3 dont l' épicentre est précisement à quelques centaines de mètres de chez moi (Meythet, près d'Annecy : voir la Google-Map). Pas beaucoup de dégats, une fissure apparente dans l' escalier, mais je suis quand même très inquiet : mon client va-t-il se désister ? Il persiste dans son intention mais, ouf ! j'ai eu chaud. Et j' ai eu peur aussi qu' il veuille encore baisser le prix car le produit de la vente représente tout mon avoir et toutes mes ressources pour les deux années à venir.

Ce que je quitte :


Le lac d' Annecy


Les vieilles prisons


Le Thiou


Le château


Un canal de la petite Venise de Savoie




Parfois le lac déborde...


Ce qui ne gêne pas la faune !






Couleurs d' automne


Arc en ciel

J'habitais Meythet, dans la banlieue d' Annecy, un important noeud de communication international, si, si, ne riez pas, l'autoroute y franchit le Fier :




Il y a même un aéroport où l'on n'atterrit pas forcément en même temps que l'avion :




Et même s'il n'y a pas de gare, on peut aussi passer devant en train !

Le Fier est un obstacle qui nécéssite la construction d'un pont superbe :






Toute cette circulation, ça donne envie de bouger, non ?


                        Première partie : un petit tour en France et en Europe.


Vendredi 11 octobre 1996 au soir.

Je prends la route et arrive en soirée à Saint Bonnet de Mure, un peu avant Lyon. Un tour du monde commence dès qu'on a franchi la porte de chez soi. Le lendemain je gagne Poitiers et le Futuroscope en passant par Tarare, Lapalisse et Montluçon. Si Séville 1992 invoquait beaucoup le passé, le Futuroscope est entièrement consacré....au futur (ce n' est pas pour rien que j' ai voulu passer par Lapalisse ) A Séville j'avais découvert le tout premier écran haute définition, ici je vois le film de Jean-Jacques Annaud "Les Ailes du courage" en 3 D sur écran 360°. Je retrouve quelques éléments qui avaient déja été utilisés à Séville, notamment une petite tour panoramique et un mur d' écrans. Je n'oublie pas de visiter la ville de Poitiers et ses vieilles églises avant de gagner la région des châteaux de la Loire.

Mercredi 16 octobre

Après une nuit à Blois je visite successivement les châteaux de Chambord, Blois, Amboise, Chenonceau et surtout le Clos-Lucé à Amboise, la dernière résidence de Léonard de Vinci avec un beau musée, avant de découvrir à Loches les ruines du château fort où Louis XI enfermait ses malheureuses victimes dans une cage étroite, et enfin je m' arrête à La Haye, la ville natale de Descartes, rebaptisée d' ailleurs Descartes. Mais c'est étonnant que cette petite bourgade se soit appelée ainsi auparavant quand on songe que c'est précisément le nom de la capitale des Pays-Bas où René Descartes a passé la partie la plus grande et la plus productive de sa vie.

Vendredi 18 octobre

Je me dirige à présent vers la Bretagne en passant par Chinon, Saumur, Angers, Nantes et Vannes. Dans cette quête des monuments significatifs du riche passé de mon pays, les alignements de menhirs de Carnac tiennent évidemment une grande place, au propre comme au figuré ! Le génie d' Astérix et d' Obélix s'est donné ici libre cours. Je finis ma visite du site par une pointe jusqu'à la presqu' île de Quiberon.

Dimanche 20 octobre

Escale à Saint-Malo. Mais ce n' est pas le moment du renommé festival " Etonnants Voyageurs ". Je poursuis donc en direction du Mont Saint-Michel que je n'ai pas revu depuis ma petite enfance et qui m'avait laissé une impression mémorable, à la hauteur d'un site unique au monde, mystèrieux, grandiose, exaltant. Et je descends à l'auberge de la mère Poulard pour goûter à la suavissime omelette et contempler les photos et autographes des innombrables célébrités de la planète qu'elle a su rallier sous son toit, un paradis pour les paparrazzi.

Lundi 21 octobre

Après le spectacle d' un coucher de soleil sur la baie agrémenté par l'envol soudain d'un faisan rivalisant de couleurs mordorées avec l'astre du jour à son départ, je roule de nuit pour arriver au petit matin au cap de La Hague, flairer le vent au Nez de Jobourg et rejoindre Cherbourg sans pépins : lorsque j'ai la mauvaise idée d'évoquer le film de Jacques Demy au bar où je prends mon petit-déjeuner, la serveuse déplore la mauvaise réputation injustifiée désormais collée au nom de sa ville. Le reste de la journée et des suivantes est consacré aux plages du débarquement à partir de Sainte Mère l' Eglise et son clocher poitu menaçant le postérieur des parachutistes du jour J et les plages d' Utah Beach, d' Omaha Beach avec sa funeste pointe du Hoc, les ports d' Arromanches et de Ouistreham. Le lendemain je repasse par Deauville où j' ai travaillé deux saisons d' été, à l' hôtel du Golf.


Le mur de l' Atlantique


L'hôtel du Golf à Deauville

Jeudi 24 octobre

Je gagne Paris en passant par Lisieux.


Le Carmel de Lisieux, qui inspira ma soeur Françoise.

Je vais utiliser les jours suivants pour faire des achats de cartes, de guides et d'équipement et surtout pour prospecter les agences afin de trouver le meilleur tarif pour mes billets d'avion (Rappellez-vous qu' internet n'existe pas encore) Après avoir prospecté l'agence Anyway qui me renvoie à une adresse inexistante, puis la Cité des Voyages qui ne propose que des produits haut-de-gamme et des itinéraires figés, je trouve enfin mon bonheur à la Compagnie des Voyages en acquérant un billet pour Entebbe avec British Airways pour commencer et un billet tour du monde qui se termine cependant à Bangkok car d'une part la validité n'excède pas un an et je ne veux pas prévoir aussi loin dans le temps, d'autre part Bangkok est une place excellente pour trouver des billets à très bon marché pour la suite de mon périple. D'ailleurs, ayant déjà été à Bangkok en 1981, c'est donc là que je bouclerai effectivement mon tour du monde dans le sens Est-Ouest.

Jeudi 31 octobre

Départ en cette nuit d' Halloween pour jeter un coup d'oeil à la cathédrale de Reims, puis au moulin de Valmy avant de me reposer à Varennes en rêvant de Louis XVI et de Marie-Antoinette. Le lendemain j'arpente les rues de Verdun et me recueille au fort de Douaumont, cet effroyable cimetière d'une génération de français et d' allemands sacrifiés à la vanité de généraux bien à l'abri.



 Je continue par le Luxembourg pour atteindre Trèves le lendemain soir et admirer in situ la magnifique "Porta Nigra", prestigieux souvenir du temps où la ville était l' une des capitales de l' Empire Romain, surveillant l' agitation des tribus germaniques au-délà du Rhin. La Moselle qui coule à ses pieds inspira son chef d'oeuvre à Ausone, le premier poète français (d'avant la France, les francs étant alors encore de l'autre côté du Rhin) connu, puisque natif de Bordeaux, et dont une des propriétés dans le vignoble de Saint-Emilion continue d'honorer la mémoire avec un cru prestigieux, le "Château Ausone". On y trouve aussi la maison natale de Karl Marx, qui ne voulut pas se contenter de lire l'histoire mais qui voulut aussi la faire. Puis je rejoins le Rhin vers Coblence et descends vers Aix-la-Chapelle.




Samedi 2 novembre

On l'aura remarqué, j'enchaîne les hauts-lieux de l'histoire de France, de l' Europe et du monde. Aix-la-Chapelle est la capitale de l'empire de Charlemagne, la première capitale de l' Europe en effet. Il n' en reste plus guère qu'une partie de la cathédrale mais la visite est néanmoins intéressante.



Je passe ensuite à Maastricht, le symbole de l' Europe d'aujourd'hui qui peine toujours à se (re-)construire après 1200 ans. Lorsque j'arrive à Amsterdam où j'ai vécu pendant mes années hippies (1971-1972) j'ai du mal à reconnaître les lieux. D'ailleurs tous les hôtels ou hébergements possibles sont complets et je ne pourrais y rester comme prévu. Je m'arrête cependant dans un des fameux "coffee shop", le "Goa", pour tester la qualité du produit qui y est mis en vente et qui n'a pas grand chose à voir avec le café, malgré son nom.

Dimanche 3 novembre

Au petit matin je franchis la très longue digue du Zuydersee d'où je contemple les vagues d'une mer passablement agitée avant de poursuivre ma route en direction de Groninguen, puis Brême et finalement Hambourg, le point le plus septentrional auquel je sois parvenu jusqu'à présent dans ma vie, pas bien haut vous me direz, mais j'ai toujours préféré la chaleur des latitudes tropicales ou équatoriales.

Lundi 4 novembre

Si je commence mon tour du monde par une virée en Europe du nord, c'est que je pense déjà un peu au retour. Hanovre où j'arrive aujourd'hui ne m'intéresse pas seulement parce qu'elle est la ville de Leibniz mais aussi et surtout parce qu'elle prépare une exposition universelle pour l'an 2000 et que cela peut présenter de nombreuses éventuelles opportunités d'emploi en accord avec mes aspirations. Mais l'office du tourisme me semble assez léthargique et peu enthousiaste, me renseignant du bout des lèvres. Bah, je me passerais d'eux pour trouver du boulot et d'ailleurs je prévois d'être de retour en France, si je ne me suis pas établi quelque part en route auparavant, largement avant l'an 2000. Mais ça serait quand même chouette si je pouvais participer à un évènement de l'ampleur de l'expo de Séville en 1992 qui m'avait laissé rêveur, enchanté et séduit.

                                      Deuxième Partie : L' Afrique

Vendredi 8 novembre
A 12 heures 46 le TGV quitte la gare d' Annecy pour Paris. Je vais y faire mes derniers achats :
1 veste de trekking, 1 bouteille pour filtrer l'eau, 1 moustiquaire, 1 sac de couchage en plume pour la haute montagne et des gants en prévision de l'escalade du Kilimandjaro. Et je n'oublie pas de refaire une visite au Zoo de Vincennes afin de me familiariser avec mon futur gibier de chasseur....d'images ! Je monte au 3° étage de la Tour Eiffel pour voir les panneaux indiquants la distance qui me sépare encore des principales villes du monde que je m'apprête à découvrir.
Je suis descendu à l'hôtel "Louxor", derrière la Bastille, au nom prémonitoire : j'ai bien l'intention de passer par cette ville fameuse, mais je n'imagine pas à quel point elle a failli devenir mon terminus définitif, comme on le verra...au moment voulu !

Lundi 11 novembre



Décollage en fin d'après-midi pour Gatwick où je prends la correspondance pour Entebbe. J'apprends avec une certaine déception que l'avion fera escale à Nairobi avant d'atteindre sa destination finale. Pourquoi ? Parce que Nairobi se situe en dessous de l'équateur, contrairement à Entebbe, juste au dessus, et que je franchirai donc la ligne en avion et non pas à pied comme je tenais absolument à le faire pour cette première fois. Si j'avais su cela avant, j'aurai pu prendre le billet moins cher pour Kilimandjaro Airport, alors que j'ai préféré Entebbe, pensant me rendre à l'équateur tout proche sans l'avoir jamais franchi auparavant. Je me console de ma déconvenue en regardant pour la deuxième fois le film projeté : "Independance day", en anglais cette fois. La première fois, c'était en allemand dans un cinéma de Hanovre, il y a moins d'une semaine !

Mardi 12 novembre

Arrivée à Nairobi. Je suis surpris par la température presque fraîche. Je consulte mon altimètre et constate que nous sommes à 1600 m d'altitude. L'avion redécolle bientôt et survole une mer de nuages qui empêche de répérer le Mont Kenya, deuxième sommet d' Afrique après le Kilimandjaro. Nous approchons Entebbe en passant au dessus du lac Victoria et distinguons bientôt le nom inscrit en pierres blanches sur le gazon avec un frisson rétrospectif en songeant au raid fameux de l'armée israélienne, le 4 juillet 1976, il y a 20 ans maintenant, pour libérer les otages de l'avion d' Air France.



L'aéroport est construit sur une presqu'île avancée . Je me hasarde dans l'aérogare , une fois débarrassé des formalités policières et douanières et me fait rabrouer par un garde : l'endroit où j'étais allé observer les environs est réservé aux VIP. Je déjeune sur place puis prends mon sac à dos et vais à pied affronter les trois kilomètres qui me séparent du village, en découvrant les rivages du lac dont la surface est couverte à perte de vue de végétaux envahissants qui l'étouffent. Y a-t-il toujours des crocodiles là-dessous, ces crocodiles qu' Idi Amin Dadda nourissait en leur livrant ses prisonniers ?




                           
Je m'arrête, épuisé par la chaleur, au premier guesthouse rencontré, le "Lake Side", où je trouve même une télé en état de marche dans la chambre (ce soir je regarderais "E.T.") et j'étends ma moustiquaire toute neuve sur le grand lit car c'est bien ici, au bord du lac, qu'on doit craindre les moustiques au maximum. Je pars ensuite reconnaître la localité, filmant sur un arbre une agglomération de chauves -souris, et notant une certaine similarité du paysage avec celui des Indes, en particulier le sol de latérite rouge, la végétation luxuriante, les maisons décrépies fermées par des grilles, les feux épars pour la cuisine et l'absence d'éclairage public. Je suis abordé par un jeune qui me soutire 5000 shillings, soit-disant pour la protection des espèces, puis passe devant le très luxueux hôtel "Lake Victoria " à la piscine attirante, après quoi je m'informe des conditions nettement plus abordables du Sophie's Motel ou de l' "Entebbe Beach Resort" pour un prochain séjour.

Mercredi 13 novembre

Je vais à Kampala en minibus. Je me répère, passe devant la poste, puis le Speke hotel, tâtonne un peu avant de trouver le Tanzanian High Commissionner où je demande un visa et suis surpris de la rapidité avec laquelle il m'est accordé. L'employée souligne d'ailleurs que si elle voulait demander un visa pour la France, il lui faudrait compter au minimum un mois d'attente ! Ensuite je vais réserver une chambre à l'Athina Club pour le lendemain et gravis Kololo Hill, une zone truffée d'ambassades et de militaires. Cherchant un point de vue d'où pouvoir faire un panoramique de la ville, je me suis mis en retard pour retirer mon passeport et devrais le récupérer demain seulement. Je m'allonge par terre sur le dos pour filmer les marabouts dans leurs nids perchés dans les arbres ou bien postés sur les lampadaires. Ils servent d'éboueurs municipaux. Puis je filme encore le temple sikh, souvenir de l'époque où les indiens étaient nombreux ici, avant d'être chassés par Idi Amin Dada.

Jeudi 14 novembre

Je prends un taxi pour gagner Kampala et m'installer à l'Athina Club. Je vais chercher mon passeport et au retour visite le musée de l' Ouganda. L'après-midi je vais à Port-Bell dans l'intention de me renseigner sur la traversée jusqu'en Tanzanie et suis atterré d'apprendre qu'il n'y a plus de bateau direct pour Mwanza, car l'unique navire qui assurait la liaison a chaviré il y a quelques mois, vraisemblablement en surcharge, entraînant plus d'un millier de passagers dans les flots avec lui, à qui les crocodiles (au propre comme au figuré) n'ont laissé aucune chance. Je regagne le centre et cherche en vain l'administration des parcs naturels à l'adresse donnée par le Lonely Planet. C'est elle qui délivre les autorisations nécéssaires pour visiter les gorilles.

Vendredi 15 novembre

Je me rends au ministère du tourisme en passant devant le parlement. Là on m'indique qu'il existe en fait un "Tourist Information Board", Kimathi avenue, où l'on me donne la nouvelle adresse de l'administration des parcs ainsi qu'une brochure en français. J'y achète des cartes postales et un T-shirt "Bwindi Forest".


 Après déjeuner, je vais au Wildlife &camp; National Parks Administration pour me renseigner sur la situation, car la presse fait état d'une incursion de forces zaïroises et de rebelles à la frontière vers Kasese, où se situe le parc des gorilles. Je pense réserver ma visite pour le milieu décembre, dans un mois, mais l'employée me suggère d'y aller tout de suite, signalant que plus tard il y aura plus de monde et que ce sera plus difficile. Je me décide et paye donc un permis pour lundi 18 novembre. Je fais un saut à la station de bus afin de connaître les horaires et apprends que le bus pour Botogota part à 06 heures trente du matin. Je passe aussi à la galerie commerciale du Sheraton, seul endroit où je peux acquérir de la pellicule et des piles pour ma lampe de poche. Le soir venu je règle ma chambre et commande un taxi pour 05 heures trente. La patronne parle un excellent français, il y a beaucoup de compatriotes dans cet hôtel, point de chute de nombreux coopérants et membres d' ONG.

Samedi 16 novembre

Réveil à 05 heures. A 05 heures trente il n'y a personne et la porte de l'hôtel est fermée. Les gens se réveillent vers 06 heures et le taxi, rappelé entre temps arrive vers 06 heures trente. Le bus pour Butogota ne partira d'ailleurs que vers 08 heures trente. Mais il vaut mieux être en avance pour s'assurer d'une bonne place. On est en Afrique, ici, pas dans une gare de TGV ! Pour bien m'en convaincre le bus tombe en panne dans une côte, 40 km après le départ et nous attendons patiemment durant quatre heures qu'on nous envoie un bus de remplacement.




           
 J'observe une espèce de toucan et un lézard. Je fais connaissance avec mon voisin, Norbert Kagoro, auditor pour la cie "Coopers & Lybrand", qui se rend dans sa famille. Sur la route passe un camion bleu de joyeux touristes occidentaux qui me font signe. Le car de remplacement arrive enfin et nous repartons, franchissons l'équateur marqué par deux cercles en béton, un de chaque côté de la chaussée. Comme le bus ne s'arrête pas, il faudra que je revienne pour la traditionnelle photo. J'aperçois de loin la magnifique grue courronnée qui figure en symbole sur le drapeau de l' Ouganda, sans avoir le temps de pouvoir la photographier, puis tout aussi furtivement un babouin dans la savane.



 Après Ntungamo cesse le macadam et commence la route en terre. Dans une descente un camion est bloqué dans la boue, les ornières sont gigantesques. Nous descendons car l'autobus pourrait glisser dans la pente et se renverser. Je voudrais prendre une photo mais tous me font de grands signes de dénégation et certains réclament "where is the money ?" Je renonce bien que Norbert propose de prendre la photo lui-même. C'est dommage, car les ougandais sont en général des gens extrêmement sympathiques, chaleureux et ouverts. Partout je suis accueilli par des "how are you ?" bien éduqués et des sourires. Norbert descend à Rukungiri et me prévient de tenir ma caméra prête car bientôt nous passerons par un ravin vertigineux et photogénique. La nuit tombe avant l'arrivée à Kanungu puis il y a un contrôle des voyageurs qui doivent présenter le récépissé des impôts à titre d'idendité. Cependant on ne demande rien aux femmes ni à moi, pas même mon passeport. Enfin arrivé à 09 heures passées à Butogota, je suis scié par les cahots de la route et pressé de m'allonger. Il n'y a que le "Travellers Inn", un nom assez pompeux pour une baraque au toit de tôle ondulée. La douche est froide et mieux vaut ne pas trop regarder les toilettes à la turque dont la porte ferme avec un clou en guise de serrure. Heureusement, il fait noir et il n'y a pas de lumière pour voir le grouillement, seul le bruit nous convainc que nous ne sommes pas seul dans le cabinet. Toutefois rien n'arrête le progrès, il y a une salle de projection vidéo dont l'électricité est fournie par un générateur. On me propose un taxi pour aller demain à Buhoma, pour 15000 shillings. Je ne songe pas même à discuter le prix !

Dimanche 17 novembre

A 10 heures, après le petit déjeuner, départ vers Buhoma. Le chemin est magnifique, la végétation très dense, le Zaïre est tout proche. Le chauffeur me montre une colline à moins d'un kilomètre et me dit : là-bas, c'est le Zaïre. Je me promets de faire le retour à pied car le passage du véhicule est trop rapide pour que je puisse prendre des photos. Arrivé à Buhoma je suis saisi d'admiration devant l'immense mur végétal qui se dresse en face du camp : c'est le "Bwindi Impenetrable Forest National Park".


 Je monte ma tente, puis vais commander mon repas du soir à la cantine. J'y rencontre un américain et un couple de canadiens, en fait lui est français mais vit au Canada, que j'avais vu passer ce matin devant le Traveller's Inn. Je retrouve aussi le camion bleu sur le terrain en face du bureau du parc, ce sont des jeunes, surtout néo-zélandais, mais il y en a d'autres, une hollandaise par exemple. Vers 04-05 heures la pluie se met à tomber en cataractes, comme tous les jours dans cette région. Généralement, il fait beau le matin, parfois un peu nuageux tout de même et il pleut à verse l'après-midi. Le soir à la cantine, les anglo-saxons sont plutôt bruyants, c'est à qui parlera le plus fort, comme pour braver la jungle intimidante !
Je contemple le ciel équatorial constellé d'étoiles, mais il me faudrait une carte pour m'y répérer, encore que j'arrive à distinguer nettement Orion et Sirius.

Lundi 18 novembre

C'est le grand jour ! Après ma première nuit (parfois un peu fraîche!) sous ma tente toute neuve qui a brillament passé le test des averses torrentielles, j'ai mis mes deux réveils pour être sûr de ne pas louper le départ. A 08 heures je paye les 15000 shillings demandés (en plus du permis à 100 $) pour l'entrée du parc et le ranger qui nous accompagnera. Il y a deux groupes, le "M" et le "K" : ce sont les initiales des noms qu'on a donné aux familles de gorilles, M pour Mubare, K pour Katendegyere. Je suis dans le groupe M. Nous sommes six, 3 danois, 2 américaines et moi. Après un petit discours d'introduction et le rappel des règles de comportement auxquelles nous devons impérativement nous soumettre, Caleb, notre guide nous invite à monter un sentier herbeux en direction de l'endroit où les animaux se situaient la veille, à partir duquel on suit leurs traces pour les retrouver le jour suivant. Mais après moins d'un quart d'heure de grimpette les traqueurs partent sur le côté droit de la piste car les gorilles sont descendus à la suite des visiteurs du jour précédent !



 Nous avons dabord du mal à distinguer des formes sombres et confuses dans la pénombre épaisse puis Caleb nous invite à nous approcher et bientôt une intense excitation et une énorme émotion s'emparent de nous tandis que les appareils photos cliquètent en permanence, ce qui ne semble pas perturber la petite bande qui nous observe avec autant de curiosité que nous même le faisons.


 Mais tout contact direct est interdit pour préserver la santé des bêtes. Les mesures sont draconniennes. Le "Silverback", le chef de famille, s'appelle "Ruhondeza" ce qui signifie dans la langue des autochtones : "celui qui dort beaucoup" et porte trop bien son nom à notre gré car en faisant sa sieste coûtumière allongé sur le dos il dissimule son splendide pelage argenté à nos objectifs impatients.





















 Mais nous nous consolons avec le spectacle amusant du guide tentant de dissuader un petit de s'approcher de nous au délà de la barrière réglementaire des cinq mètres ! C'est qu'il ne sait ni lire les consignes de sécurité ni mesurer les distances avec un mètre !
 Après une heure de contemplation extasiée et mutuelle nous quittons les lieux à regret mais un peu déçu (moi surtout à vrai dire ) par la trop grande facilité de l'approche d'aujourd'hui, à proximité quasi immédiate du camp. Il y a même une ferme un peu en contrebas de l'endroit où nous avons rencontré les gorilles. Mais ce ne sera pas aussi facile pour le groupe K qui ne reviendra de sa traque qu'un peu avant six heures du soir, après avoir vraiment crapahuté au milieu de la forêt en se frayant un passage à la machette ! L'américain est revenu sur les rotules et s'exclame : "Don't tell me how easy it was with the M group !" Entretemps j'avais fait voir la vidéo à mes canadiens, puis j'avais lavé mon linge et m'étais baigné dans la rivière, ce qui m'avait fait gagner un beau coup de soleil !
Le soir à la cantine règne à nouveau le brouhaha des conversations des néo-zélandais.

Mardi 19 novembre

Après avoir laissé sécher ma tente détrempée par les averses je soulève mon sac et en route pour les 17 km qui me séparent de Butogota. Apercevant un somptueux début d'arc-en-ciel, je m'arrête pour prendre des photos...et souffler un peu.






Plein d'enfants me saluent sur le bord du chemin et parfois me demandent de l'argent. Je donne mon stylo à l'un d'eux. Ici, il faut une provision de stylos et de bonbons, bien qu'on nous conseille de ne rien donner car ce serait favoriser la mendicité. Je pose mon sac sur la murette devant une grande villa et déplie ma carte de l'Ouganda, suscitant l'intérêt de quelques passants et je vois sortir de la maison un couple de petits vieux qui discutent un moment sur le pas de la porte. Me revient alors à l'esprit une réflexion de mes canadiens : "Dans ce pays, on ne voit pas beaucoup de gens âgés !".
Juste avant d'arriver à Butogota quelqu'un me renseigne sur les bus qui vont à Kabale. Il y en a un précisément le mercredi qui va de Kinkizi à Kabale et s'arrête à Kanungu où je pourrais le rattraper en prenant le bus de Kampala à  05 heures trente du matin. Je repasse donc la nuit au "Butogota Travellers Inn" dont le gérant papote avec moi et me demande de comparer la France avec l'Ouganda.

Mercredi 20 novembre

Réveil à 05 heures, départ entre 05 heures trente et six heures. Arrivée à Kanungu vers 06 heures 50. Le bus pour Kabale est déjà là, j'ai juste le temps d'y monter et il part. Dommage, je me serais bien attardé pour prendre une photo de la brume s'écoulant en lambeaux blanchâtres le long des pentes et paraissant déborder des maisons sur la ligne de crête avec le ciel rose du levant en arrière-plan. Ensuite la route passe au sommet des collines dont l'altitude atteint jusqu'à 2300 m en longeant des forêts de résineux exploitées par des bûcherons, avec de temps en temps des perspectives à couper le souffle sur les vallées en contrebas. Puis un pont flottant traverse un marécage et on nous demande de descendre du véhicule afin de diminuer la charge. A Kabale je choisis de prendre une chambre au "Victoria Inn" pour deux nuits et marche jusqu'au lac Bunyonyi à quelques kilomètres par une bonne route qui s'achève en montée assez raide sur une hauteur d'où la vue s'étend jusqu'aux volcans du Rwanda frontalier. Je prends rendez-vous pour retourner au lac demain, en voiture cette fois et en canot sur le lac, vers "Bwama Island".



Jeudi 21 novembre

Je gagne le rivage du lac en taxi puis monte dans une pirogue pour visiter les îles, un peu inquiet pour mon matériel photo et vidéo. Mon pagayeur indique une grande bâtisse en ruine près du débarcadère en signalant que son propriétaire, un opposant à Idi Amin Dada, fut éxécuté par ce dernier. Nous nous arrêtons d'abord sur un îlot-musée de cases traditionnelles malheureusement vides puis sur un autre où je tente de photographier les nombreux oiseaux d'espèces variées.




Je fais le chemin du retour à pied et juste avant d'arriver en ville je suis surpris par une forte averse dont les conséquences se feront sentir jusqu'au sommet du Kilimandjaro : en effet j'ai aux pied mes chaussures de montagne, complètement trempées. Encore humides plusieurs jours après, je croirais bon de les laisser sécher sur le pont du navire pendant la traversée du lac Victoria : c'était sans compter les voleurs agiles pour qui ces chaussures représentaient un petit trésor. Une fois débarqué, impossible d'en trouver d'équivalentes et mon guide refusera de me laisser continuer au-délà de Gilman's point à cause des étendues dangereusement verglacées qu'il restait à franchir jusqu'au sommet.

Vendredi 22 novembre

Je prends un pick-up de Kabale à Kisoro. Après la montée, superbe point de vue sur les volcans de la chaîne des Virunga et la plaine à leurs pieds où l'on distingue un gigantesque camp de réfugiés.
Dans la forêt j'ai pu apercevoir trois singes, deux babouins et un colobus. Je descends à l'hôtel "Mubano" et me rends au bureau d'information du parc où l'employé est en liaison radio avec d'autres postes. J'y rencontre Scott Woods, un américain qui voyage pendant un an en Afrique, ayant commencé par Le Cap. Il connaît bien la restauration et les vins de France. Nous parlons donc métier en attendant une jeep qui doit amener d'autres visiteurs pour les gorilles que Scott va voir demain. Ils arrivent vers 18 heures trente : c'est un couple de suisses avec leur propre Toyota, qui font aussi le tour du continent. Ils descendent à l'hôtel Virunga et nous mangeons tous là. Je trouve une prise pour recharger la batterie de ma caméra vidéo.

Samedi 23 novembre

Je vais réveiller Scott et les suisses à 06 heures trente. Nous prenons un café. Arrive un jeune anglais qui connaît Scott et veut aussi aller voir les gorilles. Mais les suisses n'ont plus de place dans leur véhicule, aussi comme Andrew est obligé de prendre un taxi pour le parc, je me propose pour partager la course. Je n'avais pas l'intention de retourner voir les gorilles en venant ici, seulement me promener en admirant la chaîne des Virunga, mais je suis pris dans l'ambiance et l'excitation et me décide finalement à accompagner mes nouveaux amis.


 Nous prenons nos entrées au parc, moins bien organisé apparemment que Bwindi, puis partons à la recherche des animaux, ce qui s'avère beaucoup plus difficile que lors de la fois précédente, il y a quatre jours. Après une montée dans les collines au pied du volcan nous atteignons une forêt de bambous et crapahutons dans un fouillis de lianes, souvent à quatre pattes au ras du sol et à la merci de voraces fourmis rouges pendant plus d'une heure avant de parvenir sur le bon site avec un soulagement non déguisé. Mais la vue sur les volcans ainsi que sur la plaine où l'on discerne le Zaïre et, par délà le lac Mutanda les montagnes du parc de Bwindi d'où je suis venu est splendide. Nous photographions à loisir un groupe de femelles et leurs petits puis partons sur les traces d'un silverback qui s'enfuit à notre approche. Notre poursuite dans la végétation intense est finalement vaine et lorsque nous retournons au premier emplacement, nous constatons que les gorilles ont déménagé, à l'exception d'un seul.



Il est d'ailleurs temps de rebrousser chemin si nous voulons rentrer avant la nuit et avant l'orage qui menace. nous nous apercevons que même les rangers ont du mal à s'orienter dans cette jungle inextricable et tatonnent avant de retrouver le sentier qui nous permettra de redescendre vers le monde civilisé, descente pénible car nous sommes complètement détrempés à la fois de l'intérieur par la sueur et de l'extérieur par l'humidité ambiente. Finalement nous rejoignons avec soulagement la limite de la forêt et le spectacle de la vue dégagée sur la plaine de Kisoro nous réconforte malgré le temps maussade.

Pour revenir à Kisoro, n'ayant plus de taxi, Andrew et moi voyageons sur le toit de la toyota à la grande joie des habitants.

Dimanche 24 novembre

Andrew et moi prenons le bus de Kampala. Nous longeons le camp de réfugiés puis le bus s'enlise et il faut plus d'une heure d'efforts pour le dégager. J'essaie de prendre quelques vues du haut du col "Kanaba Gap" malgré les violents cahots.



 A  Mbarara Andrew descend pour gagner Fort Portal où il espère arriver avant ce soir. Je continue jusqu'à Masaka, l'embranchement de la route de Tanzanie. Je prends une chambre à l'hôtel "La Nova" dont j'apprécie immédiatement la douche chaude, une sensation oubliée depuis Kampala.

Lundi 25 novembre

Après avoir réglé ma note je saute dans un "share-taxi" qui me conduit jusqu'à Kyotera et de là je prends un pick-up qui m'emmène en me décoiffant jusqu'à la frontière à Mutukula. Après avoir passé les services d'immigration ougandais je franchis le no man's land entre les deux pays où l'on me propose de changer mes shillings ougandais contre des shillings tanzaniens : comme je n'ai aucune idée des taux en vigueur je me fais royalement estamper. J'aurai dû me renseigner à la banque ce matin et même y acheter des shillings tanzaniens! Le fonctionnaire de l'immigration se montre très interessé par mon vieil appareil photo (Olympus OM1, bientôt vingt ans !) et s'étonne d'apprendre qu'il fonctionne encore.



 Assailli de propositions de minibus pour aller à Bukoba j'opte pour la land-rover signalée par le Lonely Planet. Le boy porte un t.shirt signé "Vuarnet" sans avoir aucune idée de ce que ce nom peut bien signifier. La land-rover tombe en panne à moins de cinq kilomètres de Bukoba. Mais le paysage qui semble s'étendre à l'infini vers l'ouest ne permet pas de pressentir la proximité du rivage. Arrivé à Bukoba un des passagers de la land change 20 $ chez un commerçant. J'aurai dû l'imiter car au port je m'aperçois que les tarifs sont bien plus élevés que ce à quoi je m'attendais : 7900 shillings la 1° classe et il ne me reste que 4500 shillings. Je propose 20 $ au guichetier qui les accepte pour le billet. Je mange le poisson local au restaurant puis montre la vidéo des gorilles à des jeunes qui eux aussi attendent le bateau et constatent au vu de ma carte de l'est africain que nous, les occidentaux, sommes mieux informés sur leur propre pays qu'eux-mêmes n'auront jamais les moyens de l'être. Au moment de monter à bord, surprise : il y a une taxe d'embarquement de 5 $ pour les étrangers. J'ai le choix entre me séparer d'un de mes derniers billets de 20 $ ou tenter de payer avec ce qui me reste de shillings. Le fonctionnaire m'en réclame d'abord 3000 ! Finalement il me laisse quitte pour les 2300 qui me restent et qui m'auraient été bien utiles pour le restaurant et le bar du bord. On m'indique le pont de la 1° classe et je me rends compte qu'il n'y a que des banquettes en bois. Heureusement que j'ai mon tapis de sol et mon sac de couchage ! Le pont est bruyant mais n'est pas éclairé, à part la splendide pleine lune qui inonde le lac de sa lumière argentée. Un des passagers ressemble à un retraité de l'armée des Indes, barbu rubicond tirant de grosses bouffées de sa pipe. Il voyage avec sa femme et ce vieux couple ( qui revient peut-être en des lieux où ils ont déjà vécu ) m'attendrit. Le bateau quitte enfin le port et hélas le pont supérieur s'éclaire. Je m'installe pour la nuit et suis bientôt réveillé par un membre de l'équipage qui me conseille de rentrer toutes mes affaires à l'intérieur du coffre sous le banc si je ne veux pas qu'on me les vole. Je suis son conseil en maugréant un peu car si j'ai pris un billet de 1° classe c'est précisément pour être dans un endroit à l'abri des possibles voleurs. Bien m'en a pris puisque les seules choses que j'ai laissées dehors, mes vieilles chaussures crasseuses et puantes, vont disparaître dans l'heure qui suit malgré que je ne dorme que d'un oeil ! Il me reste des sandales en plastique pour aller dans l'eau. Je n'aurai pas cru que mes vieilles godasses pouvaient tenter les malhonnêtes et ce n'est qu'en arrivant à Muanza et en cherchant à remplacer ce que j'avais ainsi perdu que j'ai compris mon voleur : une paire de désert boots qu'on trouve en France à 150 Frs coûte ici 350 Frs et des chaussures de montagne plus de 500 Frs, environ le revenu ANNUEL moyen par habitant !

Mardi 26 novembre

Nous arrivons au port de Muanza en même temps que le soleil se lève. Le site est rocheux, des bosses grises arrondies, pas d'arêtes vives. Partout des canots avec des pagayeurs et des bateaux à voiles traditionnelles. Je progresse lourdement chargé vers le "Forex bureau" indiqué sur la carte du Lonely Planet à l'autre bout de la ville et ne trouve rien. Après bien des allées et venues je m'aperçois qu'il y a un bureau de change à la station de bus un peu plus loin. Cette fois-ci le taux est nettement plus intéressant : 1 $ = 575 shillings. Comme un franc = 100 shillings, c'est comme si les prix étaient directement donnés en centimes français. Je vais à la gare et suis déçu de m'entendre dire qu'il n'y a plus de 1° classe disponible ni même de 2° classe. Il y a de la place en 2° classe jeudi. Comme il n'est pas question que je passe les 40 heures du voyage en 3° classe je me résoud à réserver pour jeudi et prends une chambre au "Lake Hotel" tout proche. J'y prends mon petit déjeuner puis me glisse sous la douche : il y a bien un robinet d'eau chaude mais c'est sûrement pour faire joli !
Vers midi je pars à la recherche d'une gargotte. Les renseignements fournis par le Lonely Planet sont à revoir de A à Z : le "Blue Café" est fermé (pour la journée ? pour midi ? définitivement ?) le "Nile Cafe", s'il existe toujours, n'est en tout cas pas de l'autre côté de la rue, quant au "Sitar Indian Restaurant", il n'est pas non plus à l'adresse indiquée mais un peu plus loin. Je m'arrête pour y manger. On passe un morceau de Santana. Je déguste une "cream of tomato soup" accompagnée d'un kebab éthiopien, arrosés de tea masalla (à la canelle) Pour digérer je me promène vers le yacht-club et commence à ressentir les effets désagréables de la tourista. J'ai juste le temps de m'accroupir derrière les rochers à l'abri des regards indiscrets. Heureusement que j'ai les poches pleines de papiers, les quittances et reçus divers que je conserve méticuleusement ! L'endroit fourmille de gros lézards, certains rouges et bleus, que je filme et photographie.





Suite sur la page "TDM II AFRIQUE SUITE"