TOUR DU MONDE VI Pérou


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                                                               PEROU





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Tour du Monde 1996/1997 in a larger map


Dimanche 20 avril 1997 (suite)

Le paysage des bords du lac Titicaca est magnifique. Le dimanche est jour de marché, nous traversons plusieurs rassemblements de bovins, et aussi d'ânes, de moutons, de cochons et de...lamas. Arrivé à Puno, en cherchant l'hôtel Italia je tombe sur l'hôtel Europa où je prends une chambre simple pour 15 soles. Puis je vais à la gare toute proche acheter le billet pour Cuzco le lendemain (56 soles) en classe "executivo" car il n'y a plus de disponibilité en classe "inka". Je visite ensuite la cathédrale, le seul beau monument de la ville, monte sur la colline où trône une statue de l'inca, qui est agrémentée d'une glissade pour les enfants, puis vais jusqu'au port encombré d'une sorte de mousse verte. Au bar de "La Hosteria" je prends un "wacsapta" (un genre de grog) puis je mange, pour assez cher.

Lundi 21 avril

J'arrive à la gare à 7 heures 30 pour un départ à 8 heures. La place prévue pour les bagages est limitée au strict minimum, il faut caser ce qu'on peut sous les sièges ou la table car les serveurs circulent dans l'allée centrale. Je suis assis à côté d'un japonais et j'en profite pour réviser mes maigres connaissances. Je lui emprunte son guide de l' Amérique du sud. Il y a aussi un couple de français qui voyage sur tout le continent. Je leur montre les photos que j'ai fait développer à Rio. Ils ont sympathisés avec un couple péruvien et la femme constate qu'avec son salaire elle ne pourra jamais aller même seulement en Argentine par exemple. A part ce couple le wagon est rempli de touristes de tous les pays, israéliens, argentins, américains ( = yankees, gringos) allemands, etc...Nous franchissons un col à 4314 mètres. A un arrêt un mendiant fait la manche en jouant sur l'intérêt morbide des passagers : c'est "Elephant Man" en personne que nous dévisageons et qui scrute en retour la fascination mêlée de répulsion qu'il suscite en nous. Personne pourtant n'ose prendre une photo de lui.


Nous arrivons à Cuzco vers huit heures du soir, accueillis par les démarcheurs des hôtels. Le japonais, Sato Yoshihiko, me propose de partager un taxi jusqu'à l'hôtel qu'il a choisi dans son guide, le "Cahuide". Le prix affiché à la réception m'effraie, mais c'est sans compter sur les redoutables talents de Yoshihiko pour le marchandage. Nous prenons chacun une chambre single avec bain pour 10 $. Je remarque à côté d'un énorme pilier un panneau indiquant une alcôve où se réfugier en cas de tremblement de terre. Diable ! Si on n'a pas le temps d'y parvenir, la maçonnerie massive et pesante des murs donne une impression plutôt inquiétante.

Mardi 22 avril

Hier nous étions arrivés dans la nuit, j'avais juste remarqué que le taxi passait dans des rues dont les murs de pierre étaient nettement de style inca. Ce matin je constate que la rue où se situe l'hôtel, la rue Saphy, bien que peu éloignée du centre, de la Plaza de Armas, est déjà presqu'à la campagne, dans une vallée étroite qui monte vers Sacsahuaman. Je me promène dans la ville ancienne, la base des murs est inca, mais sur ces soubassements le reste des constructions est de style espagnol, avec des vérandas de bois ciselé. Les rues sont pavées, mais pas en or comme voudraient nous le faire croire les légendes de l' Eldorado, hèlas ! Je découvre une multitude de porches aux sculptures baroques. Très peu de voitures dans le centre ancien, mais un maelstrom de touristes et de gens qui s'accrochent à leurs basques. Innombrables sont aussi les agences de voyage et excursions.

 
 
La Plaza de Armas


 
 
 Je visite le "Coricancha" après avoir mangé un "chicharon", puis la cathédrale et je croise deux fois les jeunes français du train. Je retrouve aussi Yoshihiko avec lequel je me rends à la gare de San Pedro (pour les trains qui vont au Machu Picchu) mais elle est déjà fermée. Au marché voisin je craque pour un poncho en alpaga que je paye 120 soles finalement après marchandage du prix de départ : 180 soles. Mais Yoshihiko est déçu de voir que j'ai cédé si vite, lui aurait encore fait descendre les enchères. En tout cas je dois aller changer 200 $ de travelers car ces 120 soles, c'est tout l'argent péruvien qu'il me restait !  Le soir mon ami japonais et moi allons manger dans un bistrot de la rue Procuradores à 5 soles le menu : pisco sour, potage, truite (un peu maigre, il est vrai) dessert, maté de coca.

Mercredi 23 avril

Je monte à l'ancienne forteresse de Sacsahuaman qui, surprise, est en fait juste en haut de la colline qui domine la ville au nord, juste en haut des arbres qu'on voit sur la pente en face de l'hôtel. Je suis ébloui et enchanté par le site.





























 
 


 
 
 
 
 

 

 
 
 

 
 

Ce n'est que vers 14 heures que j'entreprends d'aller au bout de la route vers Puca Pucara et le "Bain de l' Inca". Le chemin est splendide, il domine la ville de Cuzco tout du long, il y a des bosquets, des rochers et une campagne verdoyante avec des troupeaux de toutes sortes de quadrupèdes mélangés. Un enfant pose pour le touriste sous la surveillance de sa mère. Je le baptise "Zorino".



 

 
 
Puca Pucara
 





Le "Bain de l' Inca"







Quand je redescends et arrive à Qenqo il commence à faire sombre. Mais là encore je trouve des rochers fissurés comme des éponges, des galeries, des souterrains, encombrés de touristes même à cette heure tardive, et j'en profite pour apprendre que le rocher, le menhir qui se dresse devant nous était en fait une statue de puma, symbole du pouvoir chez les incas et détruit par les espagnols, qu'au solstice du 21 juin le soleil illuminait à 10 heures du matin le souterrain aux parois couvertes de feuilles d'or, et que partout sur le rocher on sacrifiait des lamas dont le sang était recueilli dans de petites rigoles, certaines formant des zig-zags.



 
 
Lorsque la nuit est tombée je descends sur Cuzco illuminée, fourbu mais énivré par le charme insensé de l'endroit. Je tombe sur Sato qui a rencontré une compatriote, Eiko, et nous allons manger tous les trois au même endroit que la veille, au grand plaisir du serveur qui note consciencieusement des bribes de japonais sur son calepin. Eiko vit à New York et est venue au Pérou accompagner une amie journaliste qui suit l'affaire des otages de l'ambassade japonaise à Lima (qui a débuté alors que j'étais à Dar-es-Salaam) Or justement les péruviens ont attaqués cette ambassade la veille et libérés les otages. En rentrant à l'hôtel hier soir j'avais remarqué à la télévision qu'on montrait un groupe d'hommes dans un hôpital et j'avais eu l'intuition qu'il s'agissait des otages libérés. J'avais appelé l'attention de Sato qui fumait dans le hall et en interrogeant le concierge nous avons appris qu'il y avait eu une intervention de l'armée, un otage était mort ainsi que deux policiers et tous les 14 terroristes de Tupac Amaru. Justement la journaliste japonaise et Eiko revenaient de visiter Nazca et tombèrent sur l'opération "Chavin de Huantar". Du coup, plus question de faire du tourisme pour la journaliste et Eiko se retrouvant seule avait décidé de venir à Cuzco où elle avait tout de suite attrapé le "soroche", le mal d'altitude, la pauvre !

Jeudi 24 avril

Sato est parti ce matin pour visiter Ollantaytambo. Je me renseigne dans une agence pour le chemin de l'inca, puis je me décide pour Pisaq, ça tombe bien, c'est le jour du marché.

 
En bus sur la route de Pisaq.
 
Après avoir un peu flâné en regardant les étals d'artisanat, renouvelé mon stock de feuilles de coca et acheté la pierre qu'on doit garder dans la bouche en les mâchant, je me mets en quête du chemin qui permet de gagner le sommet de la montagne qui domine la ville neuve sur lequel se trouvent les ruines de la ville ancienne. Ne l'ayant pas déniché je suis la route goudronnée puis coupe à travers la forêt par des racourcis le long du torrent. A part un palmier (à 3000 mètres d'altitude, tout de même !) on se croirait dans les Alpes ou bien au Cachemire.
 
 
 
 
J'essaie le mélange pierre+coca qui me donne en effet un bon coup de fouet pour escalader la montagne. Un paysan s'étonne que je ne prenne pas tout simplement le car ! Arrivé en haut, j'ai du mal à me répérer sur la carte. Je constate que Pisaq est encore plus raide que je ne me l'imaginais, les groupes de maisons et monuments épars et séparés par des parois vertigineuses, presque verticales, chevauchent des crêtes et des arêtes surplombant des ravins à pic : on se demande pourquoi ils s'installaient si haut et pourquoi leurs escaliers et leurs sentiers devaient toujours se situer au bord du vide ? Mais la vue est certainement l'une des plus belles du monde quand on a dominé son vertige !
 
 






















Des tombes sont creusées dans les parois d'en face.


Les escaliers d'ici sont conçus pour les lamas.....tibétains, adeptes de la lévitation !
















 
 
 
 
 
 
 
 
 

 
En descendant je prends le sentier qui finit au village et que j'avais cherché en vain à la montée. Il passe par une gorge profonde à la végétation exhubérante. Dommage qu'il ne fasse plus assez clair pour une photo ! Mais attention, car j'ai déjà employé ici plus du tiers de mon rouleau : que va-t-il rester pour le Machu Picchu ? En rentrant à Cuzco je constate que notre groupe "japonais" a augmenté d'un membre. Nous allons au restaurant chic "La Meson del Espadores" en plein sur la Plaza de Armas déguster la spécialité locale : le "cuy" (cochon d'inde) Dans un premier restaurant il n'y en avait plus, dans celui-ci nous devons nous contenter de deux cuy cuits (sic !) pour quatre. L'animal rôti ressemble assez à un rat, Sato prend d'ailleurs une photo, et il y a plus de peau que de viande, c'est pire qu'un oiseau. Mais ce n'est pas mauvais, original en tout cas. Sato s'en va demain pour le Machu Picchu où il restera un jour à Aguas Calientes et comme je serais parti à mon tour quand il reviendra, nous échangeons nos adresses. Nous nous reverrons sans doute à Lima.
 
Vendredi 25 avril
 
Ce matin je ressens la fatigue de mes balades précédentes. J'ai le nez bouché, les lèvres gercées. Je vais quand même à l'agence Qenco réserver le trekking du chemin de l' Inca (57 $ avec un rabais car je vais utiliser ma propre tente et la partager avec l'un des participants) pour demain, ainsi que l'avion Cuzco-Lima pour le 2 mai (50 $) Je fais un tour en ville , visite le musée d'archéologie, très intéressant, là aussi il y a des momies à moitié décharnées, il y a même toute une tombe reconstituée qu'on admire derrière des vitres rouges et de magnifiques tissus incas et pré-incas. Je visite ensuite le couvent de la Merced avec son cloître de style baroque-renaissance époustouflant. Le bâtiment a beaucoup souffert du tremblement de terre en 1950. Le trésor abrite, derrière de solides grillages, un ciboire de 22 kg d'or serti de 600 perles et 1500 diamants. Ce n'est que la pièce la plus importante de la collection. Il y a aussi des tableaux de grand art. Mais il pleut, il y a des éclairs, du tonnerre, il fait froid. J'éspère que ça ne va pas durer et vite retrouver le temps magnifique de ces derniers jours pour ce trekking qui va couronner mon séjour à Cuzco et au Pérou. Au bureau de change mes lunettes de soleil tombent et le verre droit se brise.
 
Samedi 26 avril
 
Le bus de l'agence vient me chercher à l'hôtel avec bien sûr 3/4 d'heure de retard. La route d' Urubamba est magnifique comme d'ailleurs toutes les autres de la région. Puis on passe à Ollantaytambo dont le site me paraît moins impressionant que celui de Pisaq. Nous quittons le bus pour prendre le petit-déjeuner et commençons à faire connaissance : le groupe comprend 18 touristes, 5 allemands, 4 français, 2 néerlandais, un couple constitué par un danois et une anglaise, vivant à Quito, un autre jeune anglais, étudiant, deux américains (gringos) un israélien, un brésilien. Ensuite nous entamons la randonnée au kilomètre 82 (le kilomètrage est celui de la voie ferrée qui conduit à Aguas Calientes) sur un chemin qui longe l' Urubamba sur la rive gauche. La montée est assez fatiguante avec mon sac à dos hyper chargé : j'ai en effet pris mon lourd poncho tout neuf pour me prendre en photo avec lui devant le Machu Picchu ! Il y a un autre groupe devant nous, ils ont l'air d'être tout aussi nombreux que nous. Tout ce monde sur l'étroit sentier fait plutôt colonne d'infanterie. Beaucoup de cactus dans la végétation.
 
 
 
 
 
 
Nous nous arrêtons pour casser la croûte et nous reposer 5 minutes dans un pré. Beaucoup de vaches. Quelques uns cueillent des figues de barbarie. Nous passons ensuite un chemin assez escarpé devant le pont qui mène au km 88. Superbe point de vue, mais le rythme de la marche, assez rapide, ne permet guère de lambiner pour prendre des photos. Nous nous arrêtons dans une petite ferme pour le repas de midi au milieu des vaches, des cochons, chiens, chats, etc....car l'etroit sentier est le seul espace plat existant dans ce terrain en pente. Bon déjeuner avec un savoureux avocat farci au thon. Puis nous continuons vers la montagne : la rivière descend et nous montons, ou plutôt nous montons, descendons, remontons, redescendons successivement, franchissons un pont de troncs d'arbres après être passés à la porte d'entrée du parc naturel où il faut montrer patte blanche et acquitter le droit d'entrée (notre guide le fait pour nous, le péage est inclus dans le forfait) Enfin nous apercevons en contrebas les ruines du premier site important de l'itinéraire : Llactapata, malheureusement gâché par la présence de lignes à haute tension.
 
 
Puis nous entrons dans la vallée du rio Cusichaca et arrivons en fin d'après-midi au village de Huagllabamba, à 3430 m d'altitude, où nous avons notre premier campement. Je partagerais ma tente avec Berndt, un allemand de l'est qui fait beaucoup de voyages et de randonnées. Emilia, notre guide, nous fait faire plus amplement connaissance en attendant le diner, chacun se présentant au cours d'un tour de table. Les conditions d'hygiène sont assez sommaires : il n'y a pas de trou creusé pour les besoins et la réputation des habitants comme voleurs à la tire n'est plus à faire.
 
Dimanche 27 avril
 
Ce matin nous grimpons jusqu'au col "Abra de Huarmihuanusca", à 4200 m ; ça devient très dur, spécialement le 2° tronçon, même avec l'aide de la coca. Une allemande, l'amie du géant Olli, loue un cheval pour faire l'ascension. Comme je me suis arrêté au pont en bois pour prendre le passage du groupe à la vidéo je finis par être le dernier.
 
 
Première pause du matin
 
 
 
 
Deuxième pause de la matinée
 Arrivés au col nous soufflons, prenons la pose pour la photo de groupe.

 
 
Nous sommes montés par là
 

 
Et nous allons descendre par ici. En face le second col, de Runcuracay, à 4000 m, que nous passerons demain matin.

Et comme il fait assez froid nous redescendons un peu pour le déjeuner quasiment végétarien. Je parle avec les français, Xavier, un jeune qui hésite dabord à me tutoyer et un couple, Jonathan et Charlotte. Elle travaille comme architecte et elle est passionnée de photos, surtout noir et blanc qu'elle développe elle-même. Lui travaille dans la banque à Genève, il est d'ailleurs franco-suisse.
Il commence à pleuvoir, nous rejoignons le site du deuxième campement. Il y a bien des constructions mais elles sont réservées aux ouvriers qui travaillent sur le chemin et les ruines. Pas moyen de faire sécher nos affaires trempées par la pluie. Le sol détrempé nous oblige à manger debout avec cette consolation que la pluie ayant cessé nous pouvons contempler le ciel étoilé de l'hémisphère sud.

Lundi 28 avril

Nous montons vers les ruines de Runcuracay à mi-pente du second col.


Le col une fois franchi nous descendons au milieu des rochers (petit tunnel), d'une végétation splendide et des chants des grenouilles, que nous entendons lorsque le hollandais est hors de portée d'oreille car il ne cesse de raconter ses aventures et ses voyages en bavardant interminablement. Puis après un petit lac nous arrivons aux ruines de la ville de Sayacmarca, sur une crête, mais hélas dabord en plein brouillard puis sous un véritable déluge qui commence lorsque l'un des guides (Saul) tente de nous expliquer à l'aide d'un croquis dans la terre que toutes ces ruines se situent à mi-chemin entre les sommets importants de la région.
 
 
 
 
Nous suivons ensuite le chemin des incas à peu près horizontal à flanc de montagne mais la pluie et le brouillard nous empêchent de rien voir du paysage de cette portion alors qu'il paraît que c'est la plus intéressante. Il y a un tunnel comme à Pisaq.
 
 
 
 
 Puis nous rejoignons une autre ville fantôme, Phuyupatamarca, à 3600 m d'altitude, tout en haut de la montagne qui domine l' Urubamba. C'est là que nous déjeunons à l'abri précaire d'une paroi. Tara, l'anglaise qui vit à Quito et qui écrit des récits de voyage pour un journal anglais, a mal à l'estomac. Depuis ce perchoir nous entamons la descente vers le dernier campement. La pente est couverte d'une végétation luxuriante.
 
 
 
 Plus bas, à proximité du village où nous allons passer la nuit, Huinay Huayna, il y a encore deux sites incas époustouflants. Nous visitons l'un d'eux après notre installation. Hélas, la douche de l'établissement est froide. Je suis en sueur et légèrement enrhumé, je préfère attendre. Le sol est dur et il pleut pendant la nuit. Pas moyen ici non plus de faire sécher le linge qui est totalement humide. Mais il y a un bar et de la bière : les allemands qui traînaient les derniers tout le long du trajet sont ici les premiers arrivés !
 
Mardi 29 avril
 
C'est le grand jour ! Réveil à quatre heures du matin. Puis course en direction du point de vue, "Intipuncu", pour arriver juste avant le lever de soleil sur le Machu Picchu. Je revêts mon poncho et le bonnet et me fait photographier puis propose mon costume à qui le désire, mais seul Olli se fait aussi photographier avec. Des colibris nous narguent et nous passent en revue, en vol stationnaire devant les touristes ébahis. Ils doivent avoir l'habitude, tous les matins c'est la même chose. Mais je dois hélas changer de cassette juste à ce moment. Le brouillard monte de la vallée et nous cache le site par instants, mais il donne un certain charme et ajoute un côté mystérieux, formant des dentelles autour et entre les parois des montagnes.
 
 
 
Nous descendons jusqu'au site, il y a une grande pierre ou plutôt une dalle gigantesque levée et devant laquelle des marches mènent à un autel. Puis des terrasses sur lesquelles broutent des lamas qui, voyant mon poncho, s'avancent vers moi, me prenant sans doute pour un berger. Une petite hutte marque le point le plus haut de la ville d'où l'on domine l'ensemble du site.
 
 
 
 
 
 
 
 Mais il faut dabord poser nos sacs à la consigne et récupérer nos tickets d'entrée. Après une halte à la cafétéria nous visitons le Machu Picchu sous la férule d' Emilia. Pendant qu'elle donne ses explications dans le temple du soleil je filme un magnifique et énorme mille-pattes qui dîne tranquillement dans la partie interdite aux touristes. Le confort des incas était vraiment spartiate quand on voit ce qui est considéré comme un palais : pas de meubles, vraisemblablement de la paille pour dormir ! Des américaines essaient le magnétisme supposé de la table en pierre du cadran solaire. Jonathan refuse de croire le laïus d' Emilia quand elle parle du calendrier inca découpé en 12 mois. Il y a aussi une pierre dont la silhouette représente semble-t-il le profil des montagnes à l'arrière plan. S'agit-il d'un temple aux "Apus", les esprits des montagnes ? La visite guidée cesse sur une esplanade tout au bout de la ville, à l'entrée du chemin qui mène au Huayna Picchu, dont l'escalade n'est pas à la portée de tout le monde. Le brésilien est toujours en tête. Même sans mon sac à dos je souffle comme un boeuf pour ces 200 derniers mètres....de pure dénivelée. Mais la vue n'y est pas aussi vertigineuse que je le craignais car la végétation très dense cache la vue du gouffre. Seule, tout à fait au sommet, en redescendant légèrement, une partie du sentier surplombe le fond de la vallée, quasiment à pic. Cependant le Machu Picchu à l'air un peu écrasé vu d'ici. Les contrastes sont plus frappants depuis le point de vue en haut du col où nous étions ce matin, à l'arrivée du "Camino del Inca". Ce qu'on remarque surtout depuis le sommet du Huayna Picchu, ce sont les lignes à haute tension qui passent au loin, derrière la montagne. Elles passent notamment au dessus du campement de la nuit dernière et au ras du site inca que nous avions visité. Et nous apercevons également les conduites de force sur la montagne en face, en aval de l' Urubamba, et encore davantage l'hôtel "Turistas" pour l'architecture duquel on ne s'est vraiment pas foulé. Son toit de tuiles rouges ressort bien sur le fond vert de la forêt ! Ces détails frappent surtout Charlotte qui est architecte, ne l'oublions pas. La descente est toute aussi lente que la montée car le sentier, ou plutôt l'escalier, est extrêmement glissant. Les marches sont parfois ridiculement étroites. Il y a un embranchement vers un "templo de la Luna", mais il faut compter 1/2 heure de plus et je suis pressé d'aller boire un coup, je suis déshydraté, ma bouteille filtrante est inutilisable, le bouchon ayant été coupé net hier soir, je ne sais par qui ni comment. Et quand j'aperçois un bout de ce chemin à découvert à pic au dessus de la falaise je comprends que je n'aurais pas été bien loin avant de faire demi-tour : ça sera pour un autre voyage !Un américain essoufflé qui n'a pas encore atteint le quart de la montée me demande si le sommet est encore loin ! Un autre monte avec un gros sac à dos qui ne lui permettra pas de se glisser dans l'étroit tunnel juste avant l'arrivée. Et il n'y a pas de plateforme là haut, il faut se tenir debout sur des rochers pointus ! Je traverse la "zone industrielle" (de l'époque inca !), visite le temple de la Lune, prends pour un symbole érotique ce qui est en fait une tête de condor, puis me dépêche de sortir et de gagner le bar où je descends un litre de jus d'orange d'une traite. Ensuite je traîne une demi-heure pour ranger mes affaires dans mon sac à dos pendant que Berndt m'attend patiemment pour descendre. Il connait le chemin car c'est sa deuxième visite au Machu Picchu qu'il s'était empressé d'aller voir dès son arrivée à Cuzco, afin d'être sûr de ne pas le rater ! Mais en descendant j'ai soudain mal au pied , sur le côté extérieur de la cheville gauche (un tendon ?) Bientôt je ne peux plus descendre les marches du raccourci et laisse Berndt gagner directement le restaurant de l'autre côté du pont, en bas, tandis que je longe la route goudronnée où je vois s'ébattre toute une volée de perruches. Il y a aussi, comme je l'avais déjà vu dans un reportage à la télé, un gamin qui accompagne un car de touristes en courant le long du raccourci (truffé de "passages secrets" à travers la végétation) pour arriver à chaque palier de la route en lacets en même temps que l'autobus et ainsi saluer bruyamment ses occupants dans l'espoir d'être récompensé de ses efforts à l'arrivée par les voyageurs attendris. Quand je franchis le pont et atteint le restaurant Berndt a fini de manger et sirote une bière. Je me contente d'un café et grignote une tranche de cake. Après ce court repos ma cheville va mieux et nous pouvons entreprendre d'aller à pied jusqu'à Aguas Calientes. Mais nous y arrivons trop tard pour la baignade dans les eaux thermales. Emilia nous rembourse les 5 soles qu'elle avait demandé pour réserver nos places dans le train car il est déjà complet. Il faudra faire le voyage du retour debout. Un chien dort sur les rails qui traversent le bourg : les restaurants et les boutiques sont directement sur les quais. C'est pourquoi les machinistes actionnent sans cesse leur sirène dont le bruit, résonnant à travers la vallée encaissée et remontant jusqu'en haut du Machu Picchu comme un rappel inopportun de l'existence du monde civilisé au sein de l'univers tranquille et imémorial des incas, dont le bruit, donc, m'avait passablement énervé. Un électricien farfouille dans une boîte électrique en haut d'un poteau, tend des fils et peu après, juste au moment où Berndt passe en dessous, tout disjoncte avec un grand pssscht...!
Quand le train arrive le groupe s'entasse comme il peut dans le couloir archibondé à l'entrée. Il y a même des passagers (en 1° classe !) qui s'agrippent aux portières, à l'extérieur. La nuit tombe vite, on ne distingue plus que le ciel étoilé en passant la tête par la fenêtre sans vitres. Arrivés à Ollantaytambo je descends ou plutôt je me crashe car il n'y a pas de marchepied, la courroie de mon sac se découd, je me retrouve à quatre pattes dans le noir, tatônnant sur les cailloux du ballast pour voir si je n'ai rien perdu tandis qu'une marée humaine semble être descendue du train en même temps que moi et me dépasse, menaçant de me marcher sur les mains ! Après la sortie de la gare un long chemin obscur me mène au village et je m'arrête au premier hôtel que je rencontre, "Las Orchideas", quand un couple de jeunes français me marche sur les pieds pour pouvoir prendre une chambre avant moi. 5 $ ou 13 soles. Il y a une cour et un fil où je peux enfin étendre mon linge humide. Je vais manger au café Alcazar, le plus "chic" du coin car je n'ai plus de monnaie et devrais payer avec un billet de 50 soles. Il est noté dans le guide du routard comme restaurant végétarien mais j'y mange des saucisses à l'américaine (oeufs, tomates, frites) Il est décoré avec des cartes de géographie : le monde, le Pérou, le chemin de l' Inca....Je déguste de la liqueur de coca, je n'en trouverais pas ailleurs au Pérou. Et j'achète un savon pour remplacer celui perdu dans le ruisseau le deuxième jour.
 
Mercredi 30 avril
 
Les jeunes français d'à côté n'arrêtent pas de se disputer : ils doivent être en voyage de noce. Après un copieux petit-déjeuner à l' Alcazar je visite Ollantaytambo. Mais après le Machu Picchu, et je dirais même après Pisaq, difficile de se laisser impressionner. Je tente de monter tout en haut mais je suis arrêté par des murs qui ferment le site. Je longe le sentier à flanc de colline et vois en bas les bains et rigoles de la station de balnéothérapie inca. L'eau me tente mais il y a plein de fermes en amont et vu l'hygiène ambiante par ici....! En tout cas la vue et le murmure de l'eau sont déjà rafraîchissants par eux-mêmes. La culture inca ignore la symétrie et l'ordonnance de la civilisation gréco-romaine. Ici, tout est labyrinthe, fantaisie, exception savamment désorganisés. Tout est sacré, chaque roche criblée d'une multitude d'autels pour les sacrifices et les offrandes. Il y a là aussi une grande pierre plate levée dont la silhouette reproduit celle des montagnes en arrière fond, la pierre des "Apus". Après un déjeuner de spaghetti à l' Alcazar je prends le minibus pour Urubamba puis le bus pour Cuzco. Une petite fille à côté de moi me prend le bras, étonnée d'y voir des poils en abondance. A Cuzco le groupe s'est donné rendez-vous au centre de la plaza de Armas à 19 heures. Tout le monde n'est pas là, Xavier et le brésilien sont déjà partis, l'israélien a trouvé une copine et les deux américains sont malades. Nous nous rendons dans un restaurant puis dans une boîte de nuit où passe en direct un match de football comptant pour la coupe du monde. Le Pérou gagne sa qualification sur la Colombie (un à zéro) J'essaie un cocktail à trois couleurs : rouge, blanc et vert, le "Machu Picchu" ! Plus tard Mike, le new-yorkais, nous rejoint et me donne aussi l'adresse de Steven car je passerai à Los Angeles d'ici un mois et demi.
 
Jeudi 1° mai
 
Réveil très tard, mais sans gueule-de-bois. Petit-déjeuner à la caféteria Haylliy où je lis dans le cahier mis à la disposition des consommateurs les circonstances d'une aggression contre un touriste américain qui s'était promené de trop bonne heure : ça ne risque pas de m'arriver ! La ville est vraiment calme, presque tout est fermé. J'achète et je rédige mes 12 cartes postales mensuelles. Je fais laver mon linge. Pas moyen de visiter un musée aujourd'hui pour passer le temps : ils sont tous fermés.
 
Vendredi 2 mai
 
Je prends un taxi pour l'aéroport (6 soles) puis achète un T-shirt du Machu Picchu (21 soles) La piste est assez courte, elle ne convient qu'à des avions relativement petits. Nous passons au dessus des nuages, je ne vois pas le Machu Picchu. A Lima, en raison du trafic intense, l'avion fait des cercles au dessus des îles au large de la côte. C'est la première fois que je vois le Pacifique (les fjords chiliens ne comptent pas, on n'y aperçoit pas le grand large) De l'aéroport, à Callao, il n'y a pas de bus pour rejoindre le centre ville, il faut prendre un taxi : 25 soles me dit l'hôtesse au bureau d'information. J'ai envie de prendre un autre avion pour Cajamarca, mais c'est 89 $. J'aurai dû prendre un billet depuis Cuzco où il était proposé à 80 $. Finalement un taxi pour aller jusqu'au départ des bus pour Cajamarca ou bien Huascar me revient à 10 soles. Comme il me faudrait attendre trop longtemps pour Huascar je me décide à prendre le bus pour Trujillo (12 soles) Le bus longe la côte du Pacifique, à mi-pente d'une sorte de montagne-dune de sable gris. Puis au moment où la nuit tombe nous crevons une roue. Le bus s'arrête devant des restaurants de routiers mais je n'ose pas y manger, incertain de la durée de l'arrêt. Nous arrivons à Trujillo vers minuit, une heure du matin. Je suis affamé, j'avale un "caldo de gallina" (bouillon de poulet) au stand des taxis puis me fait conduire (5 soles) à l'hôtel "Palacio", calle Grau 709, où la chambre simple avec bain coûte 24 soles.
 
Samedi 3 mai
 
Lever tard, 10 heures. Bon petit déjeuner au "Demarco" pour 6,5 soles. Bien que Trujillo soit une grande ville c'est la galère pour trouver une banque qui change les travellers checks. La "Banco de la Nation" ne le fait plus. Le samedi matin toute la région envahit les banques, les queues font des kilomètres ! Finalement je change 200 $ à la banque "Wiesse" en bas de Pizarro. J'essaie en vain de trouver les minibus à l'endroit indiqué par le routard, au croisement de España et Marsiche : il faut aller plus loin, jusque devant le dépôt Coca-cola. Le site de Chan Chan fait penser à ces châteaux de sable construits par les enfants sur les plages. Mais ici la plage fait 18 km carrés. Le castello "Tschumi" est le mieux conservé (ou reconstruit ?)
 
 
 
 
L'entrée coûte tout de même 10 soles. De là je vais jusqu'au rivage du Pacifique à un kilomètre et demi. Les vagues y sont fortes. Comme la route passe le long de la plage, je ne peux pas céder à la tentation de m'y baigner....sans maillot de bain ! Je pense que les animaux de la frise de la place principale du palais Tschumi sont des écureuils; le routard écrit : "une sorte d'animal stylisé". Tout le paysage alentour est fondu dans une brume curieuse car ici il ne pleut quasiment jamais. En revenant de la mer je passe devant une espèce de pyramide à l'entrée du site dont le centre est éventré. Je ne trouve pas la "Huaca Esmeralda". Je décide de rester encore demain à Trujillo car je n'ai pas vu aujourd'hui la moitié de ce qui semble intéressant.
 
Dimanche 4 mai
 
Je me dirige vers les Huacas del Sol y de la Luna qui ne sont qu'à 3 km du centre en ligne droite mais je tombe sur une rivière à traverser à gué, il n'y a pas de pont en vue. Les pyramides sont au pied d'une montagne, en plein désert juste à la limite des cultures rendues possibles par l'irrigation (rappel : il ne pleut pratiquement jamais dans cette région bien qu'en bordure du Pacifique, l'eau vient des montagnes et c'est ce climat extrêmement sec qui a permis la conservation des monuments en terre friable)
 
 
 
 
 Des fouilles sont en cours au sommet de la pyramide de la Lune, qui ont permis de mettre au jour des frises colorées.
 
 
 La pyramide du Soleil n'est qu'un gros tas de terre. Je retourne sur mes pas puis décide de chercher un pont en allant vers le sud car je ne veux pas me mouiller encore une fois les pieds. Le canal d'irrigation sert de piscine aux gamins du village qui lèvent plus ou moins les vannes pour régler la force du courant. Le trajet jusqu'à la nationale est assez long. Arrivé là je trouve un taxi (8 soles) pour la Huaca del Dragon, tout au bout de l'autre côté de la ville. Il est déjà 3 heures et demi et le site ferme à 4 heures. La Huaca del Dragon (ou del Arco Iris) est fortement restaurée. Il y a beaucoup de touristes, plus en tout cas qu'aux grandes pyramides qui étaient pratiquement désertes à l'exception des habitants de Trujillo venus profiter (c'est dimanche) de l'oasis de fraîcheur et des guinguettes au bord du canal. En redescendant d' Esperanza où se situe la huaca del Dragon je prends un billet pour Cajamarca demain à 13 heures (15 soles) Le soir je mange à la "Chifa Ah Chan" qui n'est pas aussi bon marché que l'indique le guide du routard : 15,5 soles pour un pato aux champignons, le même plat que j'ai mangé à Cuzco, un peu meilleur ici peut-être.
 
Lundi 5 mai
 
Ce matin après un dernier petit-déjeuner au café Demarco je visite le musée archéologique et j'y apprends que sur le rocher qui se trouve au fond de la pyramide de la Lune, vers la montagne, il y avait des sacrifices humains !
La route de Cajamarca, après avoir quitté la côte du Pacifique, passe devant un grand barrage et réservoir hydro-électrique puis grimpe jusqu'à un col d'où l'on aperçoit, la nuit étant tombée, les lumières de la ville au centre d'un bassin. Je prends un taxi jusqu'à la plaza de Armas et descends à l'hôtel Plaza où une chambre immense donnant sur la plaza d'un côté et sur l'énorme patio intérieur longé par une galerie en bois de l'autre, me coûte 20 soles. Je me promène dans les rues sans pouvoir situer la fameuse "Chambre du Rachat = Cuarto del Rescate" où l'empereur inca, tenu prisonnier par Pizarre, promis à celui-ci une rançon d'or remplissant cette chambre jusqu'au plafond. Pizarre encaissa la rançon puis fit néanmoins exécuter Atahualpa.
 
Mardi 6 mai
 
Aujourd'hui c'est mon anniversaire, j'ai 51 ans. Mais à ma grande déception, c'est aussi le jour de fermeture hebdomadaire du musée et de la Chambre du Rachat que je suis venu exprès jusqu'ici pour visiter. Je n'ai plus le temps d'attendre une journée supplémentaire, il me faut impérativement repartir ce soir si je ne veux pas risquer de rater mon vol de Santiago à l'île de Pâques le 15 mai. J'aurai mieux fait de venir ici en premier et de m'attarder à Trujillo seulement ensuite. Je visite tout de même la colline de Santa Apolonia du haut de laquelle Pizarre fit donner du canon pour impressionner les indiens lors de l'arrestation de Atahualpa. Et je vais jusqu'au Baños del Inca, cherchant en vain l'élevage de poissons où l'on est censé faire du canotage jusqu'à ce que je me rende compte que c'est l'endroit tout près des eaux thermales qui est envahi par les herbes. Mon repas d'anniversaire au restaurant Salas, soi-disant le meilleur de la ville, n'est pas des plus remarquables ! A midi j'ai pris du cuy, bien meilleur marché qu'à Cuzco, mais toujours aussi maigrichon.
 
Mercredi 7 mai
 
Arrivée au petit matin à Chimbote, la ville la plus moche du Pérou et peut-être aussi du monde entier : barraques sans caractère, presque bidonville, ciel gris en permanence (comme tout le long de la côte Pacifique, d'ailleurs) désert gris entourant la ville, odeur de poisson suffocante et l'on se souvient que c'est d'ici qu'est partie la récente épidémie de choléra, bref les seules envies que donne ce patelin : vomir et fuir ! Heureusement, après m'être encore une fois trompé d'avenue et avoir fait des kilomètres pour rien je finis par trouver l'agence Moreño. Hélas le bus empruntant le canyon del Pato est déjà parti à 8 heures. Je dois donc prendre l'autre bus pour Huaraz, par Casma. Le paysage est intéressant mais je n'ai pas la possibilité de descendre au Cerro Sechin et de visiter le site. Encore un regret et quelque chose qu'il me reste à découvrir au Pérou. Le bus monte très haut et franchis un col , mon altimètre me dit 4000 m mais il s'avère 200 m en dessous de la réalité. La route en lacet est presqu'aussi vertigineuse que celle de Coroico. A Huaraz je descends à l'hôtel Cataluña qui me propose la chambre à 15 soles en me voyant hésiter (avec salle de bain et douche chaude) Je mange, bien mieux qu'hier soir, à la créperie Patrick, tenue par un français : lapin au vin rouge et crèpes flambées. Mais je ne trouve pas le départ des bus pour Chavin de Huantar.
 
Jeudi 8 mai
 
Ce matin je trouve l'agence de Chavin Express et pour 7 soles je prends le bus qui part à 10 heures trente. C'est dabord la route goudronnée, celle de Lima, puis une route en terre comparable à celle de Casma qui serpente jusqu'à un lac au dessus duquel un ravin couvert de végétation est censé présenter, vu sous un certain angle, les contours de la carte du Pérou. Puis on atteint un tunnel à 4500 m et on descend une route en lacets encore une fois avec certains passages vertigineux qui évoquent celle de Coroico. Le péruvien assis à côté de moi ne cesse de me donner des explications, de me signaler la présence d'alpagas et de plantes variées, de consulter mon altimètre. Nous atteignons Chavin vers 15 heures, avec le "Castillo" à l'entrée du village, car ce n'est qu'un gros bourg. Je descends à l'hôtel Gemini indiqué par le routard, à l'entrée, mais j'aurai dû aller au centre où il y a 2 ou 3 hôtels qui me semblent plus corrects. L'hôtel Gemini, lui, est en vente, c'est un bâtiment rudimentaire, une grange, le plus "couleur locale" de tout mon voyage. Les rues sont pleines de cochons et autres animaux, c'est vraiment la campagne. Le site archéologique est intéressant à plus d'un titre. Son éloignement des routes carrossables entraîne un moindre flux de visiteurs : la visite se mérite, il faut vouloir venir ici. L'architecture est de pierre ; Chan Chan et les pyramides de Trujillo en imitent le style, mais avec des moellons de terre séchées. Il y a surtout des piliers, colonnes, dalles gravées de dessins dont le style se rapproche de ceux des olmèques de la même époque, les toutes premières civilisations d' Amérique donc, avec ses fameuses pierres en forme de tête humaine dont une seule est encore en place sur le mur extérieur, les autres étant "rangées" dans les souterrains. Elles sont plus grandes que celles de Tiahuanaco et font, ou plutôt faisaient, face à l'extérieur alors qu'en Bolivie elles se trouvaient à demi enterrées dans une cour intérieure. Et surtout il y a ces fameux souterrains dont certains étaient utilisés pour faire trembler artificiellement la terre en y faisant dériver l'eau des rivières captées en amont. D'autres sont de vrais labyrinthes et prisons, et c'est en voyant ces oubliettes que j'ai compris pourquoi l'opération de délivrance des otages de l'ambassade du Japon à Lima a pris pour nom de code "Chavin de Huantar" : elle s'était déroulée principalement à partir de nombreux tunnels et souterrains ! Le mouvement Tupac Amaru a d'ailleurs fait savoir qu'il envisageait de faire exploser le site archéologique en représailles ! Quant au soi-disant phénomène atmosphérique mystérieux qui caractériserait la salle où se trouve l' "Anzon", un monolithe de 4,60 mètres, pas moyen de le vérifier car une grille en ferme l'entrée. Mais à mon avis il n'y a là rien d'étonnant car ce "Castillo" est un immense gruyère.
 
 
 
 Après ma visite je m'enquiers des horaires de bus pour retourner à Huaraz demain et apprends qu'il y en a quatre qui s'échelonnent, un toutes les heures de 2 heures à 5 heures du matin ! Mais il y a aussi un bus direct pour Lima, pas tous les jours mais il y en aura un demain vers 8 heures, 8 heures trente. Je préfère cette solution et prends un billet (25 soles)
 
Vendredi 9 mai
 
Le bus de Lima arrive vers 9 heures trente. Je l'attendais impatiemment car je n'ai pas pû prendre de petit-déjeuner et il y en a un prévu à bord. La route me semble bien étroite pour ce gros véhicule. A un endroit particulièrement resséré des pierres l'encombrent, tombées d'un peu plus haut car il y a des travaux. Après quelques heures nous rejoignons la "nationale" venant de Huaraz et descendons vers la côte et Lima non sans avoir grimpé auparavant un col à 4100 m environ. J'y ai acheté un fromage pour 13 (trece) soles en croyant dabord avoir compris le prix comme étant 3 (tres) soles. En Argentine déjà j'avais confondu le tarif de la maison de thé à Gaiman : 12 (doce) pesos et non 2 (dos) Nous arrivons très tard à Lima et l'arrêt n'est pas sur l'avenida Montevideo comme je le croyais car s'y trouve l'agence principale de la compagnie, mais dans une ruelle perdue au fond d'un quartier labyrinthique. Des gens qui effectuent une livraison de viande pour le compte du transporteur acceptent de me prendre en taxi et nous traversons toute la ville pour chercher l'hôtel Larco, avenida Larco à Miraflores. Après avoir demandé 10 fois notre chemin nous atteignons le but vers minuit. C'est tout près de la plage en fait. La chambre coûte 27 soles (10 $) Mais si Sato est passé par ici, ce qu'on ne peut me confirmer à la réception, il y a déjà longtemps qu'il est reparti. Je suppute d'ailleurs qu'il n'aura pas voulu rester dans un établissement aussi sommaire et médiocre.
 
Samedi 10 mai
 
Je gagne en deux bus le siège des transports Ormeño qui ont une liaison directe pour Santiago. Hélas il n'y en a que deux par semaine dont une le jour même à 13 heures trente. La suivante, mardi, arriverait trop tard pour que j'attrape mon avion pour l'île de Pâques. Il me faut donc partir immédiatement sans prendre le temps de visiter Lima dont je ne connais même pas le centre ancien puisque tous mes trajets se sont fait dans des quartiers périphériques modernes. Décidément, la fin de mon séjour au Pérou se transforme en course contre la montre. J'aurais peut-être pû prendre l'avion, certainement beaucoup plus cher que les 90 $ de Moreño, ou bien faire le voyage en plusieurs traites : Lima-Nasca, Nasca-la frontière-Arica, Arica-Santiago, ce qui me serait revenu moins cher, mais il aurait fallu être absolument certain de trouver de la place à chaque fois pour arriver à temps. J'aime mieux garder une marge de sécurité. J'ai juste le temps de retourner à l'hôtel y chercher mes bagages et de prendre un taxi pour revenir au siège des bus Ormeños où j'ai remarqué les autocars super-confortables qui assurent le trajet Caracas-Santiago. Quelle n'est pas ma déception de constater que le bus de Santiago est tout à fait ordinaire. J'avais pensé que le prix était si élevé justement à cause de la différence de confort. De plus, nous nous arrêtons pour manger dans des établissements qui, sauf le premier à Nasca, ne sont pas particulièrement confortables, au niveau des installations hygièniques surtout ! Je partage ces réflexions avec un autre passager, franco-chilien, qui vit au Venezuela et vient de Caracas pour visiter sa famille et son pays, le Chili, qu'il n'a pas vu depuis sa naissance, ayant vécu dabord en Suisse, puis en France et enfin au Venezuela. De Nazca nous ne voyons pas grand chose car il fait nuit lorsque nous y arrivons et dinons dans un hôtel-club-camping près de l'aéroport. La vidéo du bus nous permet de voir deux films : l'un avec Eddy Murphy, l'histoire du professeur énormément gros qui met au point une potion magique qui le transforme en....Eddy Murphy (taille courante) et l'autre avec Jean-Claude Vandamme : "Maximum Risk".
 
Dimanche 11 mai
 
Nous passons plusieurs heures à la frontière. Du côté péruvien le douanier antidrogue  détaille méticuleusement tout mon bagage, vérifiant les cinq rouleaux de pellicule, comptant les pièces de monnaie, analysant mon herbe "maté" avec des produits chimiques. Je me demande s'il a jamais vu de la drogue dans sa vie ? Il n'y a même pas un chien.
 

 
 Du côté chilien ils sont nettement mieux équipés, ils ont un appareil à résonance magnétique. Le souci sanitaire est également plus développé et je dois jeter le restant de mon fromage péruvien non encore consommé. La frontière passée nous sommes frappés par le contraste apparent avec le Pérou voisin. Les bâtiments semblent mieux construits, même s'ils ne sont que des H.L.M. Il y a des voitures partout. Pourtant le paysage est tout aussi désertique, presque jusqu'à Santiago et depuis Trujillo le ciel est uniformément gris. Le long de la côte, je ne sais plus où exactement, un endroit s'appelle...."El Alamein" ! Il y a parfois des palmeraies quand un rio amène l'eau des Andes, mais sinon c'est partout le sable et la sécheresse. Nous avons encore droit à une vidéo : "La Croisière Fatale", très bien fait, un peu le même argument que dans "Mort sur le Nil", mais cette fois-cile paquebot part de New York vers l' Europe et tout est fait pour qu'on s'interroge sur la santé mentale du personnage principal, une femme qui croyait partir en voyage de noce, et cela presque jusqu'à la fin.
 
Lundi 12 mai
 
Ce matin café dans l'autobus. La route se traîne en méandres jusqu'à Santiago où nous arrivons plus tard que prévu, vers 21 heures, car nous sommes restés bloqués le long de la route suite à une panne. A l'arrivée des rabatteurs proposent un hôtel à 7 $ mais comme ils mettent un temps infini à nous y conduire (l'un d'eux est même visiblement saoûl) je décide de partir à pied et naturellement dans la mauvaise direction pendant plus d'un kilomètre avant de poser la question : où est le centre ? et d'apprendre que je lui tournais le dos. Comme en plus la station de bus en est déjà très loin et que je ressentais une envie d'uriner et de déféquer très pressante car je m'étais retenu, ne voulant pas utiliser les toilettes du bord ni celles des arrêts, vraiment trop peu engageantes, la marche en direction de l'hôtel Caribe tourne vite au calvaire et, en plein centre, pas de terrain vague ou suffisament sombre et à l'écart pour m'y soulager. Je n'ose pas non plus prendre un taxi, bien qu'ils soient bon marché, parce que je n'ai que 800 pesos sur moi et si le prix de la course était supérieur il ne me restait comme argent comptant qu'un billet de 100 $ que je n'aurais pas pû changer à cette heure tardive. Heureusement je finis par arriver à l'hôtel et m'y précipite aux baños avant de prendre une chambre pour 3000 pesos. La leçon à en tirer est qu'il faut toujours avoir de l'argent disponible en petites coupures, et qu'il faut accepter de changer à la frontière même si le taux n'y est pas suffisament avantageux car on n'est pas sûr de pouvoir le faire avant d'en avoir vraiment besoin.
 
Mardi 13 mai
 
Je vais changer 300 $ en travellers à la banque de l' American Express, dont 100 en 5 billets de 20 $. Puis je vais confirmer le vol pour l'île de Pâques dont j'apprends que l'horaire de départ est maintenant avancé à 17 heures au lieu de 18. Puis je grimpe sur le Cerro Santa Lucia, visite le centre culturel français où n'existe plus le restaurant "La Quiche Lorraine" et le quartier de Bella Vista, enfin le zoo peuplé de lions grassouillets et de tigres repus coincés dans des cages étriquées. A la nuit tombée je passe devant le palais de la Moneda.
 
Mercredi 14 mai
 
J'appelle Jimmy à qui je demande de m'envoyer mon courrier en poste restante à Tahiti où je serais dans un peu plus d'une semaine. Je n'arrive pas à joindre ma famille, tombant toujours sur des répondeurs ce qui m'inquiète passablement. Je prends le funiculaire et le téléphérique du Cerro San Cristobal pour avoir une belle vue d'ensemble de Santiago et je passe devant la maison de Neruda, la "Chascona", près de la gare du funiculaire.
 
Jeudi 15 mai
 
La navette pour l'aéroport coûte 1000 pesos. J'essaie encore de téléphoner en France depuis le hall de l'aérogare, toujours sans obtenir de réponse et indique sur les répondeurs comment me joindre à l'île de Pâques toute la semaine qui vient en leur donnant le numéro de "Ana Rapu Guest House" où je compte descendre. L'avion décolle à 17 heures précises et atterrit 5 heures plus tard sur la piste de l'aéroport de Mataveri.
 
SUITE SUR LA PAGE TOUR DU MONDE VII : OCEAN PACIFIQUE


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