TOUR DU MONDE 1996/1997 PAGE XII et FIN : Egypte/Athènes/Rome
Suite de la page XI : Cambodge/Thaïlande
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Jeudi 30 octobre 1997
L'avion part avec un retard considérable : après avoir gagné la piste il est revenu en arrière et a rouvert ses portes pour je ne sais quelle raison : des passagers égarés ou malades ? Il vient de Tokyo, il y a des stewards japonais dans l'équipage et beaucoup de touristes japonais à bord. Peut-être certains d'entre eux figureront-ils parmi ceux qui....mais chut, attendons le 17 novembre.
A l'arrivée au Caire je veux tirer de l'argent mais le guichet automatique m'indique de réessayer plus tard ! Le fonctionnaire de l'immigration met un tampon sur mon passeport mais ne me demande pas de visa. J'espère qu'on ne m'en réclamera pas à la sortie. Il y a des rabatteurs pour les hôtels et agences de voyage de l'autre côté du guichet alors qu'on est toujours dans la zone hors douane ! Décidément je suis tout de suite dans le bain ! L'office du tourisme est en cheville avec les agents de la galerie à la sortie et quand je demande les hôtels bon marché il me colle l'un d'eux dans les bras ! J'ai un mal fou à me dépétrer de là. Je ne peux plus retourner dans l'aérogare pour demander d'autres renseignements concernant les moyens de transport et je fulmine. Mais heureusement je trouve l'arrêt des bus à air conditionné pour le centre ville (3 L.E.) De là je vais au pif en remontant vers la gare et quelqu'un m'indique obligement le bon quartier où je trouve un immeuble décrépi et poussiéreux. Dans la cage d'escalier, gigantesque et sombre souvenir de temps meilleurs, un ascenseur rouillé et hors d'usage végète au rez de chaussée. Plusieurs guest-houses se partagent les différents étages. J'en choisis un au hasard où un lit en dortoir est à 20 L.E. Les salles de bains ont l'air propre et il y a de l'eau chaude, mais pas de café malgré ce qu'annonce un panneau. Je fais une première reconnaissance et franchis le Nil. La circulation est démentielle, personne ne s'arrête pour laisser passer les piétons et il n'y a ni feux rouges (pas respectés de toutes façons dans les très rares endroits où on en a mis) ni passages cloutés. Tout est poussiéreux et couvert d'ordures. Les gens sont accueillants, et c'est sans doute une consigne du gouvernement de faire dire "welcome" par tout le monde et à tout bout de champ, mais aussi incroyablement collants, gluants, arnaqueurs et insistants. Je n'ai pas passé une journée en Egypte et j'ai déjà envie de fuir !
Vendredi 31 octobre
Je passe la journée à visiter le musée du Caire en plein centre mais complètement isolé, sans doute à cause du terrorisme islamiste. Il y a des hommes en arme devant tous les hôtels, les banques et tous les endroits fréquentés par les touristes. Il y a des portillons électroniques à l'entrée des hôtels et des musées. Si c'est pour rassurer les étrangers apeurés c'est raté : on se croirait dans un pays en guerre. Comme une bonne partie de la ville est d'ailleurs en ruine on a aussi l'impression de vivre dans une cité récemment bombardée. Le tremblement de terre de 1992 a bon dos : la plupart de ces effondrements provient surtout de la négligence et de l'absence d'entretien. Au musée du Caire, assez mal présenté dans l'ensemble et visiblement à l'étroit, il y a un billet supplémentaire pour voir les momies. Je les laisse bien volontiers à leur absence de paix éternelle.
Samedi 1° novembre
Je visite la ville islamique du Caire ainsi que le souk "Khan El Kalili". Je suis stupéfait de l'état de délabrement de tous les bâtiments y compris les trésors archéologiques de l' Egypte du moyen-âge. Les rues défoncées, les immeubles à moitié éffondrés, la populace déguenillée, c'est certainement le pays le plus sordide de tous ceux que j'ai visités jusqu'à présent, même la Tanzanie ne donnait pas une telle impression de détresse, seul le Cambodge s'en approche mais là-bas les femmes ne sont pas exclues de la vie publique, enfermées ou voilées.
Je vais jusqu'au nord, aux portes fortifiées de l'enceinte qui furent utilisées par l'armée de Napoléon, qui n'était d'ailleurs encore que Bonaparte à l'époque. Je passe devant la mosquée Al Azhar en plein travaux puis gagne la citadelle pour le coucher de soleil, malheureusement elle est fermée à cette heure.
Dimanche 2 novembre
Je prends le métro pour Hélouan d'où je vais à pied jusqu'au Nil. Je descends à tort un ou deux kilomètres vers le sud, en fait le débarcadère était juste à l'arrivée, j'aurais pu le trouver en faisant 200 mètres vers le nord. De l'autre côté du fleuve il faut marcher plusieurs kilomètres jusqu'au village de El Badrashein et de là encore deux kilomètres jusqu'à Memphis dont je visite l'inintéressant musée et le site pratiquement inexistant. Puis je continue en direction de Saqqara mais il se fait tard et je renonce à aller jusqu'au bout, reviens sur mes pas et refranchis le Nil. Je prends un minibus jusqu'à la gare d' Hélouan.
Lundi 3 novembre
Je refais le même trajet que hier, prends un minibus jusqu'au débarcadère puis après le ferry un autre minibus pour El Badrashein jusqu'à Saqqara et de là me rends à pied le long de la route suivie hier jusqu'au bout cette fois-ci. Mais je suis bien le seul à marcher car étant donné les distances les gens prennent des taxis. Je traverse le désert, m'arrête au "Resthouse" derrière la pyramide où les prix s'apparentent à l'extorsion de fonds. Je vois les pyramides de Gizeh au loin pour la première fois. Je visite le Sérapéum, le "cercle des Philosophes", en fait des statues sans têtes ni bras, comment a-t-on pu reconnaitre les philosophes ? Et des tombes aux jolies peintures et scènes de genre. Partout en embuscade des gardiens, chasseurs de bakchichs. Enfin je contourne la pyramide à degrés, majestueuse.
Au loin vers le sud j'aperçois et photographie les pyramides de Dashour. Je descends le long du chemin qui mène de la pyramide de Unas à son temple mortuaire dans la vallée. J'y rencontre un jeune garçon avec un âne qui me demande si je veux le photographier. Comme je refuse, il me propose de monter sur l'âne. Comme je refuse toujours il s'enhardit et se propose lui même sans équivoque ! Il est plus que temps que je quitte cet endroit.
Mardi 4 novembre
Mon programme pour visiter les pyramides est de le faire par ordre chronologique, en commençant par la plus ancienne, celle de Saqqara que j'ai vue hier et en terminant par les plus récentes, celles de Gizeh, après avoir vu successivement celles de Meidoum puis de Dashour. Je vais à la gare me renseigner pour prendre le train jusqu'à Meïdoum. Le bureau d'information me demande d'aller me renseigner au guichet de tourisme qui me renvoie à des guichets situés en dehors de la gare où l'employé me conseille d'aller me renseigner.....au bureau d'information ! J'arrive quand même à obtenir les horaires mais il est trop tard pour aujourd'hui. Je visite la mosquée d' Ibn Tulun.
Bien qu'arrivé à la gare vers neuf heures, à temps pour le train de dix heures, je suis exaspéré parce qu'on me dit de prendre le billet dans le train, on ne veut déjà plus vendre de billet au guichet. Je m'emporte contre l'inefficacité et l'impéritie de la S.N.C.F. égyptienne et de toute l' Egypte en général. Je reprends la route de la citadelle mais lorsque j'y parviens j'apprends que la porte où je suis est fermée et qu'il faut se présenter du côté diamétralement opposé à un bon kilomètre de là ! Je commence à en avoir ma claque de l' Egypte ! Quand j'y arrive il reste une demi-heure d'ouverture à peine. Je m'étais dit qu'à 10 L.E. je prendrais le coucher de soleil mais l'entrée est à 20 L.E. Je finis donc de faire le tour complet par l'est, suivant la voie rapide.
Jeudi 6 novembre
Je monte dans le train et prends le billet pour Al Wasta à bord. La pyramide de Meïdoum, ou plutôt le corps intérieur qui est resté debout après qu'elle se soit effondrée, est visible peu avant l'arrivée en gare, massive et impressionnante, toute seule en bordure du désert. J'y vais à pied, la croyant plus proche qu'elle n'est réellement car un canal passe devant et il faut suivre la route qui va dans le désert et le traverse avant de revenir par un détour infini. Et pas un véhicule de touristes de toute l'après-midi. Ce n'est pourtant pas la place de parking qui manque par ici ! A peine arrivé à la barrière et payé le billet d'entrée un guide-chasseur de bakchich s'accroche à mes basques en agitant furieusement la clé du passage intérieur devant mes yeux mais je l'ignore et fait le tour du monument, construit après Saqqara et sans doute écroulé à cause de la pente trop forte donnée à ses parois. C'est pourquoi la première pyramide de Dashour qui était en construction à la même époque a vu sa pente changer et s'incliner davantage à partir de la mi-hauteur, par précaution.
J'essaie de trouver un raccourci pour le chemin du retour à la gare mais en plus du grand canal il y en a aussi des petits, des chiens aboient après les étrangers et plein d'enfants piaillent "bakchich, bakchich". Je finis par faire machine arrière et coupe à travers le désert pour rejoindre la route par laquelle j'étais arrivé. La prochaine fois (s'il y en a une...) je viendrais en voiture ou à moto.
Vendredi 7 novembre
Je refais en sens inverse le chemin de hier soir jusqu'à Gizah car la gare de minibus est fermée, à Midan El Tahrir. De Midan Gizah je prends un minibus jusqu'aux pyramides. Un peu avant l'hôtel Mena House je remarque le bus à air conditionné 357 qui passe par Midan El Tahrir. Je le prendrais au retour. Après dix jours au Caire je mets enfin le pied sur ce site fameux. Je passe pas mal de temps à fouiner dans les tombes à l'est de la grande pyramide.
Je suis surpris de constater que le Sphinx est en contrebas, la dénivellation est assez importante. Je fais le tour de Chéops, pénètre dans la pyramide après avoir réussi à trouver les guichets où l'on vend les billets, absolument pas signalisés. Quand je réclame on me dit qu'on mettra une pancarte demain. Je passe devant Chephren pour faire le tour de Mykérinos (Menkharé) déjà fermé à 3 heures trente, gagne la butte éloignée pour la photo d'ensemble des trois pyramides, puis reviens vers Chephren mais l'intérieur est déjà fermé aussi. Tout autour des pyramides il y a une véritable armée de chameaux (ou dromadaires ? je ne sais jamais !) C'est une offense aux yeux des locaux que de tenir à faire la visite à pied. Je redescends vers le Sphinx et les rangées de chaises alignées en vue du "Son et Lumières" de ce soir. Je prends le 357 pour Midan El Tahrir (2 L.E.) échappant ainsi quelques instants à la foule.
Dimanche 9 novembre
Après avoir réservé mon billet de train pour Assouan demain soir à 22 heures (100 L.E. en 1° classe) je gagne Khan El Kalili puis repasse devant El Azhar (mais c'est l'heure de la prière et je renonce à visiter) et longe une nouvelle fois la rue qui mène à la citadelle. Il n'y a pas grand chose à voir à l'intérieur d'autant qu'on réclame un deuxième billet un peu plus loin après le musée militaire. La vue sur Le Caire dans la brume n'est pas spécialement exaltante. Sur les trois bistrots aucun ne propose une liste des prix ou un menu, sauf le dernier vers le musée militaire, et bien sûr ce sont des prix "touristiques". Les touristes, comme les écoliers, visitent en bataillons encadrés. Tout le quartier en bas de la citadelle est en ruine, couvert de poussière, image symbolique du délabrement du pays.
Je prends le métro pour visiter le "Vieux Caire", les ruines romaines et coptes. La synagogue me déçoit, c'est une reconstruction moderne. De la ville ancienne de Fustat il ne reste que des pierrailles. Je passe devant la grande mosquée d' Amr (là encore c'est l'heure de la prière, je ne peux pas entrer) et rejoins le "Nilomètre", à la pointe sud de l'île de Roda. Puis je me rends à la gare. Les sièges de la 1° classe sont confortables (il n'y en a que trois par rangée) mais il n'y a pas de wagon non-fumeurs, la lumière reste allumée toute la nuit et le bruit de la vidéo et des jacasseries me font regretter de ne pas avoir les moyens de voyager en wagon-lit.
Mardi 11 novembre
Arrivé à Assouan vers midi. Je descends à l'hôtel Mena où la chambre avec balcon et salle de bain revient à 30 L.E. Je réserve l'excursion à Abu Simbel pour demain (départ à 4 A.M. !) coût : 35 L.E. Le soir je me promène en ville et le long du Nil où se trouvent de nombreux restaurants. Certains sont des bateaux amarrés.
Mercredi 12 novembre
Difficile de somnoler recroquevillé sur le siège arrière du minibus. C'est une véritable procession de minibus et autobus qui se dirige vers Abu Simbel. La région est assez plate. Plusieurs autobus s'arrêtent pour le lever du soleil sur le désert. Le site d' Abu Simbel est splendide mais hélas surpeuplé. Et les visiteurs sont lourdement taxés : 36 L.E. Ce n'est pas le plus cher en Egypte (Le tombeau de Toutankhamon où il n'y a quasiment rien à voir coûte 40 L.E.) mais ici, quand on est arrivé là au pied du mur, on ne peut plus reculer. Bref, les égyptiens sont des pirates.
Et puis surtout il y a Philae, un des plus beaux endroits d' Egypte et des plus évocateurs. Encore 20 L.E. à allonger, plus le passage en bateau organisé comme une arnaque. J'ai à peine eu une demi-heure pour visiter le site et c'est quand même trop juste, même si l'île est petite.
Ensuite l'excursion s'arrête (en maugréant) à la carrière d'où l'on a extrait les obélisques de granit rose et l'un d'eux, gigantesque mais brisé, est encore en place, inachevé.
Jeudi 13 novembre
Je prends le ferry (à voile et à rame) pour Eléphantine et je parcours l'île et ses jardins. Le site archéologique est en cours d'aménagement mais assez impressionnant.
Vendredi 14 novembre
Il n'y a que deux trains par jour pour redescendre sur Louxor, l'un à six heures du matin et l'autre à huit heures du soir. Je prends celui de six heures en 1° classe (30 L.E.) On arrive à Louxor vers dix heures. Je prends une chambre à 50 mètres de la gare, à l'hôtel "Anglo", pour 20 L.E. Mais si la salle de bain est propre, la chambre elle-même est plutôt sombre avec une petite fenêtre qui donne sur un puit. Je vais voir le temple de Louxor et les rives du Nil. Pas la peine de prendre un billet pour le temple, on voit aussi bien de l'extérieur.
Après avoir traversé le Nil en ferry (1 L.E. pour les touristes) je vais à pied jusqu'au débarcadère spécial du ferry "touristique" signalé par une plaque, en vain puisqu'il ne fonctionne apparement plus. Mais où prend-on les billets pour la visite alors ? Je continue à pied jusqu'à la Vallée des Rois en passant par le temple de Séti 1° que je ne peux pas visiter car je n'ai pas de billet. A l'entrée de la Vallée des Rois la cafétéria coûte les yeux de la tête : au vu des tarifs on pourrait se croire en Suisse ou au Japon ! Au guichet des entrées je découvre que pour 20 L.E. on a droit à trois tombes (mais pas à celle de Toutankhamon qui vaut 40 L.E. à elle seule !) Il faut donc choisir les plus intéressantes. Comme celle de Séti est toujours fermée ainsi que celle d' Aménophis II, je choisis celle de Touthmosis III, une des plus anciennes, à l'entrée remarquable dans un profond ravin, puis celle de Merneptah, pharaon de l' Exode, enfin celle de Ramsès VI à cause de sa décoration représentant le ciel étoilé de la déesse Nut.
Les couloirs d'accès et les tombes sont bien plus large que je ne l'aurai cru. Les couleurs sont bien conservées ou bien auraient-elles été rafraîchies ? Depuis la Vallée des Rois j'escalade la montagnette qui la sépare du site de Deir El Bahari et sur laquelle campent en embuscade les éternels chasseurs de bakchich.
Le raccourci rejoint la route à hauteur du Ramesseum et traverse un village bourré de tombes anciennes et bien sûr d'une multitude de "guides" amateurs de bakchich et d'enfants en plein apprentissage pour suivre leurs traces. Au croisement des routes avant de revenir vers le ferry, un peu plus loin, je remarque les guichets où l'on achète les billets pour toute la région ainsi que les prix. Avec le peu qu'il me reste il va falloir jouer serré et bien choisir. On verra demain. Je passe devant les colosses de Memnon que je photographie, toujours entouré d'une nuée de gamins quémandeurs.
Le temple de Louxor.
Bien que levé relativement de bonne heure je perds du temps à chercher un endroit pour le petit-déjeuner et je retourne finalement au restaurant Amon, n'ayant rien trouvé de mieux, qui n'ouvre qu'à neuf heures. J'hésite entre retourner de l'autre côté du Nil et visiter Karnak. Je songe que j'aurais le temps d'aller à Karnak demain en attendant le train et opte donc pour la rive ouest, une décision qui m'a peut-être sauvé la vie car si j'avais fais l'inverse j'aurais été sur place quand....Je retraverse le Nil sur un gros bateau à la proue en forme de navire égyptien antique que j'avais répéré la veille : ça doit être le fameux ferry des "touristes", recasé comme ferry normal, puisque de toutes façons quelque soit le bateau les étrangers paient automatiquement le tarif "touriste". Je répartis mon maigre budget entre trois visites à 12 L.E. chacune : le temple de Médinet Habou, la Vallée des Reines et le temple d' Hapshetsout. Les portes du temple de Médinet Habou sont d'une grandeur colossale.
Puis je gagne Deir El Bahari, harcelé par les mêmes chasseurs de bakchich que la veille. Je suis déçu par ma visite car elle doit s'arrêter au 2° niveau, le 3° étant en restauration. J'ai quand même vu les fameuses fresques de l'expédition au mystérieux pays de "Pount", mais une bonne partie de ce temple est une reconstitution moderne responsable de l'aspect "casemate en béton" qui m'avait frappé hier. Je rentre à Louxor par le chemin que j'avais pris à l'aller.
Lundi 17 novembre
Je quitte l'hôtel vers dix heures en laissant mes bagages pour me rendre à Karnak. Le long de la route des fouilles remettent au jour la voie triomphale antique bordée de sphinx qui reliait Karnak à Louxor. Mais les sphinx n'ont plus de tête. J'arrive enfin à une porte énorme mais qui n'est pas l'entrée principale car celle-ci est donne sur le Nil à l'ouest alors que je me trouve au sud, à la porte "Evergète".
Je découvre la salle péristyle avec les jeunes d'une école qui prennent des dessins. L'un d'eux me frappe par la beauté de ses yeux verts. Il y a encore plusieurs ensembles monumentaux qui se succèdent, des obélisques, dont le plus grand est dû à Hatschepsout, des statues, des murs, des frises, la salle de la barque sacrée, la salle des fêtes avec ses colonnes plus larges en haut qu'en bas, puis le grand bassin où se réflète obligement l'ensemble pour la photo.
Et d'immenses portiques en reconstruction vers le sud, vers le temple de Mut et d'autres temples plus récents devant la porte d' Evergète que j'avais dabord rencontrée en venant de Louxor. Le temple de Karnak s'étend sur une grande superficie mais finalement je ne le trouve pas à la hauteur de sa réputation. Je suis plus attiré par la modestie de Louxor et par la grandeur moins galvaudée de Médinet Habou. Karnak est une cité religieuse trop préoccupée par la question de maintenir son rang, le premier, par la démesure et le colossal, au point que l'éternel mégalomane, Ramsès II, finit par faire ici figure de médiocre, noyé dans la masse. Pour revenir à Louxor je me dirige vers le Nil, tout près, et sa corniche, et je photographie le coucher de soleil sur le fleuve qui fera pendant à celui sur l' Amazone ou encore au lever de soleil sur le Gange.
N'ayant plus beaucoup de pellicules je renonce à faire un cliché, qui aurait pourtant été assez symbolique, du bateau "Africa" à moitié coulé au bord du quai. En arrivant à hauteur de l'hôpital je tombe sur un attroupement considérable et des barrages de police avec des hommes en armes. Y a-t-il eu un accident ou bien pire, un attentat ? Mais il y a peu de touristes et j'en conclus qu'ils sont là comme moi par hasard et que l'évènement concerne surtout la population locale. Je mange au restaurant Amon qui est devenu ma cantine à Louxor, sans rien remarquer d'anormal. Puis je me rends à la gare afin de vérifier l'heure de départ de mon train : 23 heures trente. Mais la gare est littéralement occupée par l'armée égyptienne. Décidement, il y a du terrorisme dans l'air : c'est un régiment entier qui est assis sur le sol du hall et jusque sur les marches à l'entrée. Mais je n'ose pas demander des précisions. Il faudrait trouver quelqu'un qui parle anglais et ma curiosité risque de déplaire. Je récupère mes bagages à l'hôtel et m'installe sur un banc de la gare.
Mardi 18 novembre
Arrivé au Caire je prends tout de suite un billet de 1° classe jusqu'à Alexandrie (31 L.E.) Je me fais cirer les chaussures dans le café des wagons-lits pour enlever la poussière de Karnak. A Alexandrie je descends à l'hôtel Union qui coûte 50 L.E. pour une chambre avec salle de bain, petit-déjeuner et télé. Je ne veux pas de la télé qui est uniquement en arabe mais on ne peut pas (ou bien ne veux pas) l'enlever. Je renonce au petit-déjeuner le prix descend à 42,5 L.E. mais la vue unique sur la rade d' Alexandrie vaut bien un petit effort financier.
Je mange au Macdo puis fais une petite reconnaissance vers l'est. Il ne reste qu'une malheureuse colonne de porphyre, unique survivante du palais de Cléopâtre. Un chantier signale l'emplacement de la future nouvelle bibliothèque d' Alexandrie.
Mercredi 19 novembre
Je visite, après un petit-déjeuner très tardif au "Trianon" au cadre luxueux et "Belle Epoque", le très intéressant musée gréco-romain. Il y a notament une splendide collection de monnaies anciennes. Je shunte le théatre romain qui ne me parait pas valoir les 6 L.E. réclamés à l'entrée. Je me dirige vers la colonne de Pompée et découvre une ville très semblable aux quartiers les plus déshérités du Caire. Je fulmine contre toute cette horrible excroissance qui surnage en lieu et place d'une des plus fascinante cité de l'histoire humaine. Le guide Lonely Planet précise qu'à Alexandrie "il faut surtout faire travailler son imagination", et j'utilise la mienne pour pulvériser et atomiser mentalement cet océan de taudis, de poussière, de crasse et de nullité. Mais comment reconstruire une ville entière à partir d'une seule colonne, tout ce qui reste du Serapeum ? Je shunte également cet endroit forcément décevant et parviens aux catacombes un peu plus loin. Décidément, en Egypte tout ce qui reste du passé ce sont les tombes. Mais celles-ci ne présentent guère d'originalité : des caveaux rectangulaires accumulés. Il y a juste une sorte de petit temple et à côté une salle de festin....mortuaire et en sous-sol. Claustrophobes s'abstenir. Je termine ma visite d' Alexandrie (et de l' Egypte par la même occasion) par une promenade en direction de l'île de Pharos. L'agitation de la Méditerranée balaie un peu le renfermé et le moisi de l' Egypte momifiée. La forteresse semble avoir été construite hier, les pierres sont toutes propres. Il pleut, c'est bientôt l'hiver.
Jeudi 20 novembre
Je prends le train de 8 heures 10 qui arrive trois heures plus tard au Caire. Je me dirige vers la station de bus de Midan Tahrir afin de gagner l'aéroport avec le bus climatisé ٣ ٥ ٧ (357) .
Ce matin il me reste 10 L.E., le bus en coûte 3 et je prends un café et un morceau de cake pour 7 L.E.
Heureusement il n'y a pas de taxe d'aéroport. J'achète un exemplaire du "Monde" avec des dollars et j'apprends seulement maintenant ce qui s'est passé il y a trois jours à Louxor, le lundi 17 novembre, une fusillade sur la rampe du temple d' Hatshepsout qui a fait 68 morts, dont 59 touristes (une dizaine de japonais, cinq anglais et beaucoup de suisses) Je n'en reviens pas ! un incroyable massacre à 8 heures trente du matin dont personne ne parle le soir même et la vie continue comme si de rien n'était. Si je n'étais pas passé devant l'hôpital, si par exemple j'avais repris le même chemin qu'à l'aller, et si je n'étais pas passé par la gare (soit en choisissant le bus ou soit en prenant l'avion) je n'aurais pas eu le moindre soupçon de ce qui était arrivé ! Rien dans l'attitude de mes interlocuteurs, serveurs, vendeurs, employés de la gare, etc...ne manifeste la moindre gêne, la moindre inquiétude. A part la répétition lancinante des "welcome" destinés à rassurer l'étranger sur les intentions pacifiques de l'égyptien moyen (mais ce n'est pas un fait nouveau et personne n'en doutait de toutes façons) rien qui fasse état de la honte ineffaçable d'avoir ainsi manqué au devoir d'hospitalité. C'est peut-être trop dur à porter, c'est peut-être une facette du fatalisme oriental devant la mort, mais c'est peut-être aussi le signe du mépris envers l'occidental et le japonais dont on envie la richesse mais qu'on déteste au fond de soi comme on déteste le pouvoir et la puissance quand on en n'est pas le détenteur. En tout cas je suis consterné. Je n'avais pas trouvé de journaux anglais ou européens auparavant, j'ignorais donc que mes parents et amis qui me savaient en Egypte en ce moment pouvaient être dans l'inquiétude sur mon sort. Il me faudra téléphoner dès mon arrivée à Athènes.
A peine installé à l'hôtel Illion j'achète une carte de 150 unités pour 1500 Drachmes, soit un peu plus de 30 FF et appelle tout le monde. La navette depuis l'aéroport jusqu'au centre m'a coûté 200 Drachmes (= 4 FF) La chambre est à 5 000 Dr (= 100 FF) avec salle de bains. Pratique, l'hôtel est en plein centre, près de la place Omonia, tout près du métro et pas trop loin de la gare.
Vendredi 21 novembre
En Grèce les musées et monuments ferment de bonne heure : 15 heures quand ce n'est pas 14 heures trente. Je visite le musée national d' Athènes qui n'a pas changé beaucoup depuis ma dernière visite, en 1975. Je suis surpris d'y trouver une très belle section égyptienne, principalement constituée par la collection d'un riche mécène grec d' Alexandrie. A la fin de l'énorme collection de sculptures je suis profondément touché par la vue du buste d' Hérode Atticus à côté de son élève et favori mort jeune et héroïsé. Il y a aussi une statue d' Antinous. Quant à Hadrien, inutile d'insister sur tout ce qu'il a apporté à Athènes (et en Egypte aussi par ailleurs). En sortant du musée je me dirige vers le Lycabète du sommet duquel la vue est époustouflante.
Samedi 22 novembre
Retour ce matin à l' Acropole. Je commence par le théatre de Dyonisos derrière lequel je trouve une grotte plus ou moins cachée depuis laquelle je photographie le temple de Jupiter. J'aimerais fouiner dans tous ces creux et chercher des souterrains mystérieux.
Je vais ensuite sur la colline en face coiffée d'un monument à un général romain défiguré par les graffitis des nouveaux barbares, émules des hérules de l'antiquité. Je monte enfin à l' Acropole dont presque tous les monuments sont environnés d'échaffaudages inesthétiques. Heureusement en cette saison la fréquentation n'atteint pas des limites insupportables. Je visite le musée dont l'entrée ne requiert pas un billet supplémentaire contrairement à ce qui me semble avoir été le cas en 1975 (l'entrée globale est de 2 000 Drachmes) Les Cariatides y sont enfermées sous verre, celles de l' Erechtéion sont des copies. J'observe la réfection du temple d' Athéna. Décidément, on n'en finit pas de construire et reconstruire le Parthénon !
Certains d'entre eux sont peut-être des reports de voyages initialement prévus en Egypte, suite aux évènements récents. Je flâne sur l' Aréopage où un autre couple de français se débat avec le plan des lieux.
Dimanche 23 novembre
Lundi 24 novembre
Pluie diluvienne. Je vais réserver mon billet de bus Athènes-Rome pour 18 000 drachmes que je paie par CB. Je répère le lieu du départ demain à 14 heures, le bureau de la cie, puis flâne dans les rues du centre et particulièrement dans une grande librairie sur plusieurs étages très bien achalandée.
Mardi 25 novembre
Depuis l'hôtel c'est tout droit pour arriver au bus. Je dois attendre dans le bureau car j'arrive bien en avance, vers 12 heures, et raconte mes aventures en Egypte à la secrétaire. Le chauffeur est un napolitain qui parle en conduisant, c'est à dire avec les mains, en faisant de grands gestes à ma grande inquiétude. Le long du golfe qui s'étend de Corinthe à Patras les rives sont couvertes de vignobles et de végétation automnale mordorée. A Patras j'achète à manger et à boire. Il faut payer 2 000 Dr de taxes portuaires. Nous montons à bord du Neptune, immatriculé à Malte.
Mercredi 26 novembre
Comme il n'y a pas beaucoup de passagers en cette saison tardive j'ai bien dormi sur les fauteuils du salon. J'utilise mes derniers drachmes pour le petit-déjeuner et un cappucino supplémentaire. Arrivés à Brindisi nous ne nous arrêtons pas en ville et je ne peux donc pas tirer des lires avec ma carte bancaire comme je l'envisageais. Nous passons devant Tarente puis Metaponte, dont on peut apercevoir les ruines anciennes, avant de nous enfoncer vers l'intérieur et gagner Naples par Potenza. Après Salerno je suis heureux d'apercevoir la côte amalfitaine puis la baie de Naples. Je me sens obligé de déclarer au chauffeur et aux autres passagers que même après un tour du monde et après avoir vu tant de paysages prodigieusement beaux je reste persuadé que cette région remporte la palme d'or. Mais mes propos tombent à plat car j'ai attendu la traversée de la zone industrielle et portuaire pour les tenir ! A Naples nous changeons de bus pour Rome. Nous ne sommes plus que trois, c'est la morte saison, la compagnie va être déficitaire ! Le nouveau conducteur met le CD des trois ténors et je n'arrive pas à me souvenir du nom de l'un d'entre eux, le gros Luciano Pavarotti, ce qui me tracasse durant tout le trajet. A Rome le bus nous largue loin du centre. Il suffirait de prendre le métro à la station Tiburtina mais même à l'arrêt de Naples je n'ai pas pu trouver de distributeur et je n'ai pas une lire. Je dois donc gagner la stazione Termini à pied. Tous les gens à qui je demande mon chemin me conseillent de prendre le bus ou le métro. Mais je ne découvre pas un seul ATM le long de ma route. Finalement je parviens au but, cerné d'hôtels à tous les prix. Mais après plusieurs demandes je me rends compte que le tarif plancher est de 60 000 lires (un peu plus de 200 FF) Je descends à la pension Laura, juste en face de la gare et paye avec ma carte pour deux jours. Puis je vais à la gare et trouve enfin un distributeur. La gare est remplie de vendeurs à la sauvette d'origine asiatique, du Bengladesh ou bien du sud-est asiatique.
Jeudi 27 novembre
Je décide de consacrer cette journée à prendre des photos. Je gagne la Fontana di Trevi, la Piazza di Spagna, le mausolée d' Auguste, puis je visite consciencieusement le chateau Saint-Ange, ancien mausolée d' Hadrien, après avoir mangé dans un restaurant de la Piazza Navona, dernier caprice de mon voyage autour du monde ! De là je flâne dans la basilique Saint-Pierre et au retour je passe par le monument à Victor Emmanuel que je tente de photographier de nuit, ainsi que le Forum, vu du Capitole, avec mes deux dernières pellicules.
Le Quirinal (Le palais présidentiel italien)
Vendredi 28 novembre
Je gagne le musée du Vatican en métro mais à dix heures du matin c'est déjà tard car la fermeture est à 13 heures trente et le circuit complet prend au moins six heures ! Je parcours le musée égyptien puis les collections de statues de l'antiquité, le musée étrusque et ses innombrables cratères grecs, la grande galerie avec ses tapisseries puis ses cartes murales de l' Italie, les pièces peintes par Raphael où je retrouve la célébrissime "Ecole d' Athènes" et enfin je parviens à la Chapelle Sixtine juste avant la fermeture. Au retour j'emprunte la galerie située sous la précédente et où se trouve la bibliothèque, hélas déjà fermée. Je ne peux non plus contempler la magnifique sphère dorée dans la cour. Quant à la pinacothèque et aux deux ou trois autres musées, il faudrait pouvoir leur consacrer une journée entière pour les visiter (15 000 lires). Je contourne le Vatican, sa muraille de forteresse n'indique pas une grande ouverture sur le monde ! Je grimpe sur la colline du Janicule par une longue route qui n'offre pas de raccourci pour les piétons. J'admire les couleurs automnales de la campagne et de la ville, puis descends vers le Tibre que je longe jusqu'à l'île devant laquelle se trouvent deux arches d'un pont en ruine. Je suis saisi des nombreuses opportunités de belles photos mais je n'ai plus de pellicules : le voyage est fini. Je gagne à nouveau le Capitole puis longe le Forum et grimpe sur la colline du Palatin par le chemin qui mène à l'église Saint-Bonaventure. Il fait nuit noire à présent. Je contourne le Palatin sans trouver l'entrée pour une éventuelle visite demain. Puis je fais le tour du Colisée, reviens par le Forum de Trajan devant lequel une équipe s'apprête à tourner un film : l'éclairage est en place, il y a plusieurs véhicules et fourgons dont un pour les toilettes.
Samedi 29 novembre
Il pleut à torrents ce matin et toute la journée avec de rares accalmies. J'achète un billet pour Saint-Raphael et en attendant le train pour Nice à 23 h 15 je visite le musée national Romain dans les thermes de Dioclétien. Comme celui du Capitole le musée national est en travaux. Il n'y a pas grand chose d'exceptionnel la statue du Discobole et une belle collection de monnaies anciennes dans les salles du Palazzo Massimi. Je suis un peu déçu car j'attendais cette visite depuis presque trente ans ! A chaque fois que je passais à Rome il y avait un empêchement quelconque, grève ou autre. Il me reste à découvrir le musée étrusque du Pincio mais il pleut, je n'ai bientôt plus d'argent et de toutes façons les musées à Rome comme en Grèce ne sont ouverts que le matin jusque vers quatorze heures. J'ai découvert cependant une grande librairie de l'autre côté de la Piazza della Republica, Feltrinelli, et je ne peux m'empêcher d'y acheter quelques livres dont une collection bilingue des textes présocratiques et le "Contre les chrétiens" de Celse dans la collection de la BUR. J'ai définitivement (au sens anglais du terme) repris mes habitudes de grand consommateur de livres, de ma vie d'avant ce tour du monde. Il va falloir y mettre le holà pour un temps. Je gagne le centre ancien, passe par le Panthéon où sont enterrés des rois d' Italie et Raphael, puis trouve après quelque errance dans le labyrinthe des ruelles sous la pluie l'église Saint-Louis des Français où je contemple longuement les grands tableaux du Caravage sur Saint-Mathieu. C'est mon adieu à Rome. Je me promet d'y revenir dès que possible, souvent : c'est une promesse de bonheur.
Dimanche 30 novembre 1997
Arrivée vers dix-onze heures à la gare de Saint-Raphael.
FIN DU VOYAGE AUTOUR DU MONDE
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