mardi 8 juin 2010

Huang Shan

















Photos publiques ( Wikimédia)

Mercredi 19 mai.

Le train de nuit me laisse à la gare de la ville de Túnxī  (屯溪) , rebaptisée Huángshān  (黄山) pour attirer les touristes bien que la montagne soit à plus de 70 km d'ici. Il pleut, tout me semble gris et triste et j'hésite plus d'une heure, seul dans le hall, ne sachant si je reste dans ce qui me semble un trou perdu ou si je reprend le premier train pour n'importe où. Finalement je me décide pour la solution la plus raisonnable, aller voir l'auberge de jeunesse toute proche, Koala Youth Hostel, et me faire une idée plus précise de la situation. L'endroit est accueillant et pas cher du tout : à peine 3 euros pour un lit. La météo est toujours incertaine,mais je prends le risque et réserve un lit pour la nuit suivante à l'hotel Bái Yún  白 雲 (nuage blanc) au sommet. Je partage la chambre avec un jeune anglais qui fait le tour du monde. Je passe l'après-midi dans la vieille rue au bord de la rivière qui constitue un quartier ancien original, " Lǎo  J" () , aux délicates façades de bois sculptés, envahie par les échoppes dont les marchandises sont surtout destinées aux touristes. La spécialité locale est la pierre semi-précieuse dans laquelle sont creusés les encriers.

Jeudi 20 mai.
Le matin de bonne heure nous prenons le mini-bus pour les Montagnes Jaunes. J'apercois des buffles dans les champs, nous sommes déja dans une région méridionale. Le chauffeur du minibus nous fait descendre a l'entrée d'une station de bus avec un panneau géant indiquant Huángshān. Je ne souhaite pas prendre un autre bus, mais comme je ne vois pas d'autre route ou chemin qui aille au délà de la station, je finis par monter dans celui qui conduit jusqu'a la première gare du télécabine de la voie ouest, la plus difficile, tandis que le jeune anglais prend la direction opposée, celle de la voie reputée moins dure, car il ne compte pas passer la nuit en haut comme moi. Nous nous séparons donc. En fait, voulant faire toute la montée à pied, je n'aurai pas dû descendre là où le chauffeur nous a laissé et insister pour aller jusqu'au village voisin d'où part la route. Mais l'immense majorité des touristes se laisse conduire jusqu'au téléphérique et la station de bus est un goulet dont on ne voie pas d'autre issue que de prendre un billet. Je regrette moins le guet-appens touristique apres une heure de montée en lacets et virages en épingle à cheveux, si j'avais été à pied il m'aurait fallu au moins deux à trois heures de plus. Et après la gare inférieure où nous laisse l'autocar, une fois pris le billet d'entrée dans le parc des Huángshān (tarif normal : 230 yuans, moitié prix pour les vieux !) commence la véritable escalade. Je ne m'étais pas imaginé cet endroit vertical à ce point ! L'escalier se faufile entre des parois abruptes, et l'on se hisse marche apres marche en longeant une cascade à la rumeur rafraichissante, s'arrêtant toutes les dix minutes pour contempler les formes curieuses des parois de granit, véritables tests de Rorschach pour l'imagination debridée des peintres et poètes chinois au cours des siècles, les pins déséspérement accrochés à la moindre anfractuosité, les oiseaux quêtant leur bectance, la végétation en pleine floraison dans un feu d'artifice de roses, mauves, bleus, lilas et surtout....pour reprendre souffle !
Arrivé sur la crête sommitale après 3 heures de marche, je constate que le sentier qui fait le tour du plateau est tout aussi escarpé car les courtes montées succèdent aux courtes descentes et il n'existe là-haut pratiquement aucun espace plat de plus de 10 metres carrés. Aussi la foule des groupes venus du télécabine remplit tout le terrain disponible et la compétition pour se faire photographier devant les pics et les pins tordus est rude. D'ailleurs les chinois semblent ignorer qu'avec les appareils modernes il n'est plus nécéssaire de prendre des poses interminables et de s'immobiliser dans une raideur contrainte, il faudrait que quelqu'un les informe que la technique a évolué depuis les cent cinquante dernières années. Mais peut-être est-ce aussi le besoin d'une sorte de rituel qui les pousse a se comporter aussi maladroitement ? Apres avoir jeté un coup d'oeil sur l'autre versant à l'est, tout aussi vertigineux, je continue sur ma lancée et m'aventure à grimper sur le pic du Lotus ( Liánhuā fēng 莲花峰 ), le sommet des Huángshān 黄山 , à 1867 m d'altitude, auquel on accède par un escalier taillé dans la crête avec un tunnel à l'arrivée qui me fait penser au Macchu Pichu en plus vertical si c'est possible ! Plusieurs fois je me demande si c'était bien raisonnable de vouloir absolument monter ici. Et à presque chaque petite terrasse, tous les cent mètres environ, il y a des gens qui proposent des boissons et souvenirs, qu'ils ont dû hisser jusque là sur leur dos ! On s'en voudrait presque de ne pas consommer, malgre le fait que les prix triplés ou quadruplés justifient l'effort. Tout le ravitaillement des hotels et restaurants du sommet est ainsi acheminé a dos d'homme a partir de la station inférieure du télécabine réservé au seul transport des touristes. Ces derniers peuvent même utiliser les services de chaises à porteur, un exploit vu la verticalité des escaliers, qui demande une bonne dose de confiance dans l'habileté, le sens de l'équilibre et la puissance des dits porteurs. Le soir venu je fais une reconnaissance jusqu'a la terrasse de l'observatoire d'où je me propose de guetter le lever du soleil demain matin, mais le temps s'annonce de plus en plus nuageux, j'ai vraiment eu de la chance d'avoir du soleil jusqu'ici. Je gagne donc l'hotel Bái Yún 白 雲 où m'attendent une bonne douche chaude et un lit dans une chambre que je partage avec un vieil americano-chinois retraité des affaires qui a vu le monde entier et un enseignant francais de Grenoble venu donner des cours à  Shànghǎi pour une semaine.

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